On peut difficilement l’envisager mais c’est une réalité. Il y a tellement d’incestes perpétrés en France que nous connaissons forcément les auteurs de ces violences, les incesteurs. Statistiquement, tout le monde en a rencontré. Très probablement, on a apprécié leur compagnie, leur humour, leur professionnalisme… 96% des humains qui commettent des incestes sont des hommes. Ils seraient environ 1 million, rien qu’en France. Après leur journée de travail ou leur séance de tennis, ces individus vont utiliser comme objet sexuel un ou plusieurs enfants de leur famille.
Un incesteur est protégé par sa famille
Les incesteurs ne sont pas des individus monstrueux, impossible à cerner, des ogres, des sociopathes. Un incesteur est au contraire un individu banal, vivant une vie classique, bien inséré socialement. Pourtant, cet homme se permet de disposer du corps d’enfants pour ses envies sexuelles. Quand la vérité est exposée, très souvent, les relations familiale avec l’incesteur ne sont pas altérées. Non seulement les victimes ont d’immenses difficultés à être soutenues et entendues. Mais ce sont souvent elles qui se retrouvent exclues du cercle familial. Les autres continuent de voir l’incesteur. Ce qui pose problème à la famille est moins l’acte que son dévoilement. La victime qui a parlé est jugée pour avoir apporté l’opprobre.
Un incesteur est un dominateur
La grande caractéristique des incesteurs, c’est leur volonté d’écrabouiller leurs victimes. L’agresseur a besoin de dominer. L’inceste représente un paroxysme de domination, puisque la relation entre un adulte et un enfant est totalement asymétrique. Même dans le cas d’inceste entre mineurs, il n’existe pas de jeux de découverte sexuelle comme on le fantasme souvent. Si c’était le cas, ces incestes auraient lieu entre enfants du même âge, entre égaux. Dans la réalité, il s’agit toujours d’une agression envers un enfant plus jeune. Et d’envie forte d’écrabouiller l’autre.
Un incesteur est rarement un pédophile
On pourrait imaginer que ces deux criminels ont des profils similaires, qui expliqueraient cette violence faite aux enfants. Pourtant, ce sont des prédateurs sexuels qui se construisent différemment.
Le pédophile se fabrique une étrange histoire d’amour, de séduction et de plaisir soi-disant partagé avec sa victime mineure.
L’incesteur recherche le pouvoir. Il n’est pas du tout dans un schéma de séduction. Il recherche la domination et donc l’écrabouillement de sa victime. Si d’aventure, il s’imagine que celle-ci prend un quelconque plaisir, cela peut redoubler sa violence.
Un incesteur est un opportuniste
Un incesteur commet le plus souvent des viols d’aubaine. Quoi de plus pratique que d’agresser sexuellement un enfant qu’on a sous la main pour satisfaire une envie. Pour résumer très très cyniquement, un enfant est facile à convaincre, facile à manipuler, il a moins de force qu’un adulte, il ne coûte pas cher, on n’a pas besoin de le séduire et il n’ira pas porter plainte…
Un incesteur n’a pas de pulsion
Un des mythes attachés aux violences sexuelles est cette notion de pulsion. Les violeurs comme les incesteurs ne sont pas sujets à des pulsions contre lesquelles ils ne pourraient pas résister… Si ces pulsions sexuelles existaient, ces violences auraient lieu n’importe où, n’importe quand. C’est l’inverse. Leurs actes sont précautionneux, prémédités, réfléchis. L’appropriation sexuelle consciente des personnes vulnérables dans la famille est juste une façon d’affirmer sa domination.
Un incesteur a souvent un passif d’enfant incesté
Un tiers des incesteurs ont vécu ces mêmes violences enfants. Sans doute plus, mais les incesteurs ne s’en souviennent pas toujours en raison d’une amnésie post-traumatique (APT), un mécanisme de défense qui fait disparaître tout souvenir trop douloureux de la mémoire. Leur propre enfance bafouée n’a pas été réparée et ce traumatisme peut alors conduire ces hommes à des comportements déviants. Cette ancienne victime va reproduire ce qu’elle a elle-même vécu, souvent au même âge et de la même façon. Cette information ne leur retire aucune responsabilité mais apporte des explications.
L’histoire du SAP, le syndrome d’aliénation parentale est intimement liée à son créateur, Richard Gardner
Richard Alan Gardner, psychologue américain né en 1931, est considéré comme l’inventeur du syndrome d’aliénation parentale.
Il a créé en 1987 cette théorie en s’appuyant sur ses observations personnelles de familles vivant des conflits de garde d’enfants.
Richard Gardner possède son cabinet de consultation à la Colombia University mais il gagne sa vie autrement. Il est utilisé comme expert psy par des avocats qui défendent principalement des pères accusés d’abus sexuels sur leurs enfants. Il est grassement payé à chaque victoire.
Gardner explique devant les juges que les dénonciations des enfants sont dans la majorité des mensonges fomentés par la mère.
L’enfant est manipulé par celle-ci dans le cadre du « conflit parental ». Il s’agirait d’un mécanisme d’autodéfense des mères pour pouvoir conserver la garde de leurs enfants.
Gardner publie plusieurs articles et établit alors le syndrome d’aliénation parentale (SAP), qui est décrit comme une manipulation de l’enfant qui, de manière continue, rabaisse et insulte un parent sans justification.
Les profils types de ces manipulateurs, selon Richard Gardner, sont très schématiques
Le parent aliénant cherche à se venger de l’autre parent par l’intermédiaire de l’enfant dont il « lave le cerveau ».
Quant à l’enfant, il a une absence de culpabilité face aux conséquences potentielles de ses accusations.
Gardner recommande une grande rigueur voire une certaine brutalité envers les enfants dit aliénés, moyen de les libérer de l’envoûtement qui les oppresse…
Gardner crée alors une liste de 83 critères qui lui permettent d’échelonner l’aliénation de l’enfant par le parent manipulateur (qui est presque toujours la mère selon lui). A la fin, on obtient un score final qui détermine le degré d’aliénation parentale.
Les critiques des confrères arrivent rapidement. La plus importante est celle de l’absence de démarche scientifique.
La sélection de ces critères part d’a priori de Gardner et de ses convictions. Son échelle de mesure est donc jugée peu fiable et trop sujette à interprétation personnelle.
Le souci, c’est que Richard Gardner a des croyances effrayantes.
C’est un défenseur de la pédophilie.
Il minimise l’impact de ce type d’abus sur les victimes, banalise la pratique et cherche souvent à la justifier.
Dans son livre « True and false accusations of child sex », Gardner déclare que « la pédophilie a été considérée comme étant la norme par la vaste majorité des individus dans l’histoire du monde » et qu’il s’agit là « d’une pratique largement répandue et acceptée parmi littéralement des milliards de personne. »
« De nombreuses sociétés ont été injustement répressives à l’égard de ceux qui ont des tendances sexuelles paraphiles et n’ont pas prêté attention aux facteurs génétiques qui peuvent les expliquer. Prendre en considération cette dimension pourrait permettre de mieux tolérer ceux qui ont des penchants sexuels atypiques. J’espère que cette théorie permettra de mieux comprendre et respecter ces individus qui par ailleurs jouent un rôle dans la survie de l’espèce. »
Gardner « True and False Accusation », note 27, 670
« L’enfant victime d’agressions sexuelles est généralement tenu pour une victime alors que l’enfant peut parfaitement initier des rencontres sexuelles en ‘séduisant’ l’adulte. »
Gardner, R.A. (1986), « Child Custody Litigation: A Guide for Parents and Mental Health Professionals », p 93
Selon lui, les abus sexuels n’auraient pas forcément des conséquences traumatisantes pour les enfants concernés, les effets dépendraient des attitudes sociales vis-à-vis de la pédophilie. Plus on se détendrait sur le sujet, moins les enfants en souffriraient. Mais pourquoi n’y avait-on pas pensé avant !!
Malgré les fortes controverses au sein de la communauté scientifique, le syndrome d’aliénation parentale gagne du terrain
Pire, le syndrome d’aliénation parentale fait des ravages dans les affaires de pédocriminalité.
Il permet de ne pas tenir compte des paroles des enfants victimes ou de celles du parent protecteur (presque toujours la mère).
A cause du syndrome d’aliénation parentale, encore aujourd’hui, de nombreuses affaires d’inceste sont classées sans suite (malgré les dossiers médicaux…). Pire, on voit de plus en plus d’enfants retirés au parent protecteur puis confiés à l’abuseur qui devient la victime aux yeux de la Justice.
Les psychologues et les psychiatres sont témoins des dégâts majeurs provoqués par l’utilisation du SAP lors des séparations parentales.
Une ré-information est en cours.
Dans une réponse ministérielle du 12 juillet 2018, le Ministre de la Justice annonce la publication d’une note sur le site de la Direction des Affaires Civiles et du Sceau, destinée à informer les magistrats sur le caractère « controversé et non reconnu » du syndrome d’aliénation parentale.
La Catalogne vient d’inscrire dans sa loi que l’usage du syndrome d’aliénation parentale est désormais considéré comme une violence institutionnelle. Et le procureur général de la Cour de cassation à Rome a condamné l’usage de ce concept.
Mais encore beaucoup trop de magistrats utilisent le concept d’aliénation parentale pour justifier la condamnation du parent protecteur pour délit de non représentation d’enfant.
Le fiasco judiciaire de l’affaire Outreau a des conséquences néfastes encore aujourd’hui sur le système judiciaire.
Rappel des faits
En 2000, à Outreau, 4 enfants confient à leur assistante maternelle que leurs parents (les Delay) leur ont fait subir des violences sexuelles. Lors de l’enquête, on se rend compte que ces enfants auraient été abusés également par des voisins et d’autres adultes car leurs parents les faisaient tourner dans des réseaux pédophiles. Leur cauchemar a duré un minimum de 4 ans. On apprend rapidement que d’autres enfants sont aussi les victimes de ce réseau.
Lors du premier procès, en 2004, les parents, les voisins (qui ont reconnu les faits) et 6 autres personnes sont condamnés. Dix-sept enfants sont partie civile et douze seront finalement considérés comme victimes, dont les quatre enfants du couple Delay.
Lors du procès en appel, en 2005, la mère innocente les 6 autres adultes (puis se rétracte). Mais surtout la parole des enfants est remise en question et apparaît désormais comme vague et contradictoire. On parle de fausses allégations, c’est la parole des enfants contre celle de ces adultes. Au final, les six personnes condamnées en première instance sont toutes acquittées. Au terme de l’affaire Outreau, le drame et le scandale qui secouent la France sont cette terrible tragédie : des adultes ont été accusés à tort par des enfants ! Dorénavant, la Justice retiendra qu’il faut se méfier de la parole des enfants.
Tragédie à 2 vitesses
Pourtant, dans cette histoire, ces 12 enfants ont bien été reconnus victimes de viols, d’agressions sexuelles et de corruption de mineurs par celle-ci. D’ailleurs, ils seront indemnisés à hauteur de 30 000€ chacun. A titre de comparaison, les adultes acquittés recevront jusqu’à 1 million d’euros par personne à l’issue des négociations entre leurs avocats et la chancellerie. De nombreuses personnalités judiciaires s’excuseront devant eux, ainsi que le président Jacques Chirac. Ils seront considérés comme les véritables victimes. La justice a davantage dédommagé les injustices faites aux adultes que les violences sexuelles odieuses et dévastatrices faites aux victimes mineures.
« On n’a jamais menti, ça je préfère encore le dire. Beaucoup de personnes nous ont traités de menteurs, nous ont abimé la santé et nous ont rabaissé plus bas que terre. Les choses qui ont été dites ne s’inventent pas. Les dessins et les versions qu’on donnait, il y a beaucoup de choses qui ne peuvent pas s’inventer. J’ai été reconnu victime, mais pas entendu. Pas suffisamment. Ne serait-ce que quand on compare la modique somme qu’on a touchée par rapport à ce que les acquittés ont touché, c’est invraisemblable. »
Jonathan Delay, un des enfants du couple Delay, au micro de France Inter
Des conséquences terribles
En septembre 2018, un rapport officiel montre l’évolution des condamnations des violences sexuelles entre 1994 et 2016. A la fin du second procès Outreau en 2005, la courbe des condamnations se casse. Le nombre de condamnations pour atteinte sexuelle sur mineur baisse de 23% alors que les plaintes augmentent.
Les droits des enfants en ont pâti immédiatement
Il y a un avant et un après Outreau dans le monde judiciaire. Les magistrats ont été traumatisés par ce fiasco et la condamnation populaire. Au lieu de réagir et de chercher les solutions à cette déroute et à toutes les failles révélées, c’est la sidération qui les a gagné. Eviter les vagues, plutôt que d’améliorer le système.
Tout est devenu confus et la seule croyance qui s’est installée durablement, c’est que des adultes sont accusés à tort par des enfants. Cette confusion n’est toujours pas réglée et tout cela se paye encore aujourd’hui par la défiance vis-à-vis de la parole des enfants et donc la diminution des condamnations des adultes maltraitants.
Ce retour en arrière réel et puissant des droits de l’enfant depuis l’affaire Outreau est aggravé par une autre triste réalité.
En 2003, un rapport de L’ONU indiquait que dans notre pays les violences sexuelles sont NIÉES de manière SYSTÉMIQUE ! L’enquête met en lumière une silenciation des victimes propre à la France. Les sévices sexuels contre des enfants ne sont pas plus courant en France qu’ailleurs, pourtant beaucoup de professionnels continuent de nier l’existence et l’ampleur de ce phénomène. Statistiquement, les personnes qui signalent des cas de violences peuvent davantage se voir accuser de mentir ou de manipuler les enfants.
Dans les pays alentours, les condamnations progressent. En France, elles régressent. Et depuis Outreau, c’est pire.
Il faut que cela change !
Conseils de lecture / écoute
Livre de Jonathan Delay : « Au-delà de l’irréparable – Une vie d’enfant de l’affaire d’Outreau » Paru le 24 février 2021
Actuellement, le lien familial, c’est-à-dire le droit du parent à garder un lien avec son enfant, prime sur le droit de l’enfant à être protégé
Comment protéger l’enfant ?
Notre association a reçu de nombreux témoignages de mères (voir plus bas) qui ont dénoncé des faits d’abus sexuels, incestes, maltraitances ou violences sur leur enfant de la part du père, mais qui n’ont pas été entendues par les tribunaux ; elles sont soit condamnées à de la prison pour délit de non représentation d’enfant, soit la garde de l’enfant est transférée au père violent. Beaucoup de mères se posent la question, alors, dans ce cas, comment protéger l’enfant ?
On parle beaucoup en ce moment de la libération de la parole. Par contre on ne dit pas que lorsque les enfants parlent, lorsque le parent protecteur lanceur d’alerte tente de protéger son enfant du parent agresseur, ils ne sont pas entendus par la justice. Comment peuvent-ils protéger l’enfant ?
Actuellement le lien familial, c’est-à-dire le droit du parent à garder un lien avec son enfant, prime sur le droit de l’enfant à être protégé, pourtant énoncé dans deux conventions ratifiées par la France : la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) et la Convention d’Istanbul issue du Conseil de l’Europe.
Deux conventions ratifiées par la France mais non appliquées
L’article 12 de la CIDE précise que les enfants doivent être impérativement écoutés dans le cadre de procédures judiciaires qui les concernent. Si cela était systématiquement appliqué, cela permettrait de mieux protéger l’enfant.
S’agissant de l’application de la Convention d’Istanbul, la France a d’ailleurs été pointée du doigt via le rapport du Grevio en novembre 2019 (voir p.57 à 60 concernant les droits de garde):
Le GREVIO exhorte les autorités françaises à prendre les mesures nécessaires pour que le règlement des droits de garde et de visite prenne en compte les violences auxquelles sont exposés les enfants et le risque de continuation des violences après la séparation, y compris le danger d’un passage à l’acte meurtrier. À cette fin, il faudrait :
– fonder les politiques et les pratiques en la matière sur la reconnaissance du fait que, dans un contexte de violences conjugales, l’exercice conjoint de la parentalité se prête à être le moyen pour l’agresseur de continuer à maintenir l’emprise et la domination sur la mère et ses enfants ;
– inscrire dans ces politiques et pratiques le principe selon lequel il est nécessaire de prévenir la victimisation secondaire des victimes, en évitant de les culpabiliser, de les discréditer et/ou de les surresponsabiliser, notamment en n’envisageant le placement des enfants qu’en dernier recours et avec une grande précaution ;
– améliorer l’application des dispositions légales sur le retrait de l’autorité parentale du parent violent et de celles sur l’exercice exclusif de l’autorité parentale du parent victime, y compris dans le cadre de l’ordonnance de protection ;
– continuer à faire connaître aux professionnels et professionnelles concernés, en particulier les opérateurs de la justice, des services répressifs, des services sociaux et du secteur médico-psychologique et psychiatrique l’infondé scientifique du « syndrome d’aliénation parentale », ainsi que sensibiliser l’opinion publique à ce sujet ;
– renforcer la coopération interinstitutionnelle et l’échange d’informations entre la justice civile et la justice pénale ;
– renforcer l’évaluation et la prise en compte des dangers que pose pour la victime et ses enfants le maintien du contact avec l’auteur des violences lors de l’exercice du droit de visite.
Toutes ces recommandations si elles étaient appliquées permettraient de mieux protéger l’enfant.
Mieux protéger l’enfant devrait être une priorité absolue en France.
Les chiffres de la violence faite aux enfants
La France a ratifié la Convention d’Istanbul, elle doit donc traduire en droit français l’ensemble de ces mesures. Il faudrait une impulsion politique forte qui se saisisse de ce sujet, et pourtant rien se passe, alors qu’il faudrait protéger l’enfant ; en effet, les violences faites aux enfants sont un fléau dans notre pays, juste quelques chiffres (1) :
Un enfant est tué par l’un de ses parents tous les cinq jours
165 000 enfants sont victimes de viols chaque année (130 000 filles et 35 000 garçons)
Seules 8% des victimes qui ont parlé ont été protégées
Seules 15% des violences sexuelles font l’objet d’une plainte. Et 74% des plaintes pour viols sont classées sans suite
65% des plaintes classées sans suite le sont pour « infraction insuffisamment caractérisée »
Ces chiffres sont insoutenables. Il est impératif de mieux protéger l’enfant en France, et c’est urgent.
Protéger l’enfant est un chemin de croix, voici quelques témoignages de mamans, qui donnent la mesure du chemin à parcourir en France.
Témoignage 1
« Je suis maman d une petite fille de 4 ans , je vis un parcours juridique chaotique depuis presque 3 ans. J’ai quitté le père pour violences conjugales, lors de ses droits de visites la petite est rentrée plusieurs fois avec des hématomes, elle parle, raconte, dit ce qu’il s est passé. Avec le soutien des médecins, et de l’école qui a fait un signalement (information préoccupante), à l’encontre du père, et avec le soutien du Défenseur des Droits, je commets le délit de non représentation d’enfant pour protéger ma fille. Je vais devoir passer en comparution directe pour cela. »
Témoignage 2
En 2020 ma petite se plaint de douleur génitale, je l’emmène aux urgences, le médecin la reçoit seule et ma fille spontanément dira que papa lui a fait mal avec ses doigts au « zouzou » et aux fesses; je dépose plainte, 15 jours après ma fille est entendue en cellule mélanie, et 4 semaines après chez le médecin légiste le papa sera entendu ; et depuis juin le dossier est chez le Procureur et toujours en cours. Sauf que la JAF viens d’ordonner une nouvelle ONC (Ordonnance de Non Conciliation) qui ordonne que mon aînée ira un week end sur deux chez le père, et ma petite une semaine sur deux; la JAF rejette toutes les preuves qui sont chez le procureur, et pour éviter la non représentation d enfant, la JAF a ordonné au père de les récupérer à la sortie de l école ; alors même que la gendarmerie après avoir entendu les propos de ma fille avait appelé le père pour lui dire de ne pas rentrer en contact avec elle, tant que le Procureur n’avait pas rendu sa réponse. Je suis tellement perdue. svp j’ai très peur.
Témoignage 3
Je suis actuellement en procédure contre mon ex mari violent, et pour non représentation d’enfant. J’ai été entendue aujourd’hui comme une criminelle . Prise d’empreintes, photos .. on m’a demandé combien je gagne et la marque de ma voiture (pour l’amende que l’on pourrait me demander le parquet). Le père m’accuse d aliénation parentale.. alors que je suis victime. J’ai divorcé pour violence conjugale et tentative de meurtre.
Témoignage 4
Je suis maman d’un enfant de 16 ans. Il ne va plus chez son père depuis maintenant trois ans car il a été victime de violences. Son père refusait de le prendre jusqu’alors. Depuis la nouvelle procédure que j’ai engagée contre lui, il demande à exercer son droit de visite et d’hébergement chaque week-end. Mon fils refuse. Mon ex-mari m’accuse à chaque fois de délit pénal. Que puis-je faire pour me protéger et protéger mon fils ?
Alors.. comment pourrait-on mieux protéger l’enfant dans notre pays ?
Pour approfondir ce sujet, nous vous conseillons deux articles juridiques de Me Philippe Losappio, avocat au barreau de Paris :
Tout d’abord un immense merci à Ciloubidouille qui a réalisé cette jolie BD pour nous ; en plus d’être une personne au grand cœur, son aide et ses conseils nous sont précieux.
Pourquoi faut-il réformer le délit de non représentation d’enfant ?
Lorsque le parent chez lequel réside l’enfant ne remet pas l’enfant à l’autre parent à la date prévue, il se rend coupable du délit de non représentation d’enfant. Dans deux cas précis cette loi pose des problèmes:
lorsque le parent craint à juste titre un danger pour l’enfant. Il faudrait dans ce cas et dans l’intérêt de l’enfant appliquer le principe de précaution et la protection de l’enfant;
lorsque l’ado est résistant: dans ce cas faut-il que la mère violente l’enfant ou exerce sur lui des pressions psychologiques pour aller chez le père ? Faut-il que la mère commette un délit (violences sur l’enfant) pour en éviter un autre (non représentation d’enfant) ?
La crainte du parent d’un danger plausible pour l’enfant établi au moment des faits incriminés doit faire disparaître l’infraction, respectant ainsi le principe de précaution et la protection de l’enfant.
Craindre un danger plausible pour l’enfant n’est pas refuser indument de représenter l’enfant; et respecter les peurs, les craintes et la vie privée de l’enfant – de l’adolescent(e) résistant(e) n’est pas refuser indument de représenter l’enfant. Il faudra bien admettre qu’il n’est pas nécessairement dans l’intérêt de l’enfant de rencontrer un parent toxique ou violent.
La Cour Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme (CEDH) est en revanche porteuse d’espoir : selon elle, la décision de justice organisant le droit de visite et d’hébergement donne une appréciation de l’intérêt de l’enfant qui n’est plus d’actualité au moment des faits incriminés; alors que l’intérêt actuel de l’enfant doit être qualifié par le juge pénal au moment des faits poursuivis. Vous pouvez retrouver le détail de la jurisprudence de la CEDH dans notre article ci-dessous.
Maître Philippe Losappio explique qu’actuellement la jurisprudence de la chambre criminelle valide la condamnation de la mère à une peine d’emprisonnement.
Un des moyens de défendre la réforme de ce délit serait qu’à chaque fois qu’un avocat défend un client susceptible d’être condamné pour délit de NRE (alors que soit l’ado est résistant soit lorsque le parent craint un danger pour l’enfant), il faudrait que l’avocat pense à déposer une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) , si des QPC sont déposées en masse, la Cour de Cassation finira par transmettre la QPC au Conseil Constitutionnel; il faut que la justice comprenne qu’il y a un vrai débat de société, que la réforme du délit de NRE est nécessaire.
Aidez nous à réformer ce délit..
…en vous abonnant à nos comptes Instagram, Facebook ou Twitter, en visitant notre site, en interpellant vos députés et sénateurs. Si vous êtes concernés vous pouvez demander à votre avocat de déposer une QPC (Question Prioritaire de Constitutionalité). Vous pouvez également nous apporter votre témoignage.
Les textes de référence pour mieux protéger l’enfant
La Convention relative aux droits de l’enfant ou Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE).
Cette Convention, signée en 1989 dans le cadre des Nations Unies, énonce, entre autres choses, que chaque enfant a le droit d’être protégé de la violence, de la maltraitance et de toute forme d’abus et d’exploitation ; et que chaque enfant a le droit d’avoir une famille, d’être entouré et aimé.
Article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme
– Droit au respect de la vie privée et familiale 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »*
Alinéa 10 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946
La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.