Quand un proche subit des violences intrafamiliales ou conjuguales, doit-on faire une attestation de témoin pour la Justice ?
Qu’est-ce que cela implique ?
A quoi cela sert-il ?
Les réponses présentées ici sont un condensé d’échanges sur ce sujet avec des victimes de violence conjugale et avec Maître Agathe Morel.
A quoi sert une attestation de témoin ?
- A soutenir les victimes moralement
Quand on est victime de violence conjugale ou intrafamiliale, la première phase importante est d’être cru. On a besoin d’être cru pour se sentir soutenu et s’éloigner de l’impression d’isolement dans laquelle toute victime se retrouve.
Le soutien moral est d’autant plus important que dans notre société le déni des violences est omniprésent.
- Aider les victimes pour leur combat juridique
Même si une attestation n’a pas un poids juridique très fort, elle fait partie du faisceau d’indices pour s’approcher de la vérité, et donne une nuance à l’affaire. Une victime dont plusieurs personnes apportent un soutien dans une affaire sensible aura plus de chance d’être prise au sérieuse dans ses dénonciations.

Écrire une attestation est une aide pour la protection des victimes de violence conjugale et donc souvent des enfants.
Pour rappel, ces derniers sont également considérés comme des (co-)victimes.
Qui peut faire une attestation et comment la fait-on ?
Les amis, la famille, les collègues de travail…TOUTES les personnes qui ont eu un contact proche avec la victime et qui peuvent attester de sa bonne moralité, compétence sociale, compétence parentale, humanité, ou de la qualité du lien avec son enfant, en s’aidant de scènes vécues ensemble.

C’est très utile de demander une attestation à un proche car cela oblige ce dernier à réfléchir à la situation, à mobiliser ses souvenirs pour pouvoir apporter des preuves.
Comment écrire une attestation et comment parler de la victime ?
On peut rapporter les paroles et les émotions problématiques de la victime :
Exemple : « Mon amie, à telle date, m’a confié ceci : Mon (ex)conjoint m’a fait subir tel acte de violence et depuis j’ai très peur de lui, surtout quand je lui amène les enfants. J’ai toujours peur qu’il s’en prenne directement à moi devant les enfants… »
La crédibilité d’une série d’attestations sera bonne si elles sont toutes différentes.
C’est pour cela qu’on ne donne pas d’attestation type. Quand on écrit une attestation, il faut toujours garder en tête ce qu’on cible, ce que l’on veut prouver.
Plutôt courte, l’attestation doit décrire avec honnêteté des gestes, des paroles directement vécues. On n’évoque pas quelque chose dont on a juste entendu parler ou alors on utilise le conditionnel.
On peut éventuellement donner son sentiment si cela apporte de la compréhension.
Ex : « Je suppose qu’il a tapé l’enfant, je ne l’ai pas vu faire, mais juste après j’ai vu l’enfant figé, tétanisé, avec une trace rouge sur la joue.

On ne fait pas de conclusions à caractère professionnel.
Par exemple, on ne dit pas :
« Selon mon point de vue, c’est une personne perverses narcissique… »
Les risques encourus lorsqu’on écrit une attestation de témoin ?
Les risques encourus lorsqu’on écrit une attestation en tant que témoin sont très faibles. On risque une poursuite pénale pour faux (pour celui ou celle qui réalise l’attestation) et usage de faux (pour celui ou celle qui utilise l’attestation).
Mais cela est très rare car :
- Le fait que l’attestation puisse être un faux est quasiment improuvable.
- Ce type de délit n’intéresse pas les parquets
- Si l’attestation a été écrite avec authenticité, sincérité, sans en rajouter des tonnes, il n’y a pas de raison de mettre en doute cet écrit.
Les risques encourus lorsqu’on n’écrit PAS une attestation de témoin ?
Au-delà de ne pas exercer son devoir civique et moral, le principal risque est d’empêcher la protection des victimes majeures et mineures. Leurs situations sont déjà très difficiles à vivre. Les possibilités juridiques pour se protéger et prouver leur situation demeurent restreintes et complexes. L’erreur serait de considérer qu’il s’agit d’affaires privées et de détourner le regard. Or ces drames ont des conséquences désastreuses sur la santé mentale et physique des victimes et par ricochet sur notre société. Les enfants victimes ne croient plus en nos institutions, en l’empathie, en la bienveillance. Ils perdent confiance et parfois ne savent que reproduire la violence qu’ils ont vécue.
Ne RIEN faire, c’est TOUJOURS se placer du côté de l’agresseur.
Si vous doutez de votre lecture de la situation, voici une liste non exhaustive de comportements problématiques que l’on peut observer ou entendre chez un agresseur intra-familial :
Violences physiques et menaces directes
- Coups, bousculades, strangulation, pincements…
- Casse d’objets pour intimider
- Menaces verbales explicites (« Tu vas voir », « Tu vas me le payer », etc.)
- Réactions inadaptées (explosions de colère imprévisibles et disproportionnées)
- Maltraitance animale (frapper ou menacer un animal domestique)
Violences verbales et psychologiques
- Insultes, cris, propos humiliants
- Dévalorisation constante, moqueries blessantes
- Harcèlement moral (y compris messages ou appels incessants)
- Intimidation physique sans passage à l’acte (postures menaçantes, cris rapprochés)
Contrôle et isolement
- Surveillance des déplacements, du téléphone, des réseaux sociaux
- Isolement social imposé : interdiction ou culpabilisation à voir ses proches
- Refus de laisser la victime travailler, étudier ou avoir une vie personnelle
Manipulation et instrumentalisation
- Instrumentalisation des enfants (doudou confisqué, menaces de ne plus les voir…)
- Chantage affectif (“Si tu pars, je me tue”, “Tu vas détruire notre famille”)
- Multiplication volontaire des procédures pour harceler ou user la victime (plaintes abusives, accusations inversées, pression judiciaire)
Violences économiques et sexuelles
- Refus de participer financièrement, contrôle abusif du budget
- Usage de l’argent pour punir ou récompenser
- Violences sexuelles, y compris viol conjugal
- Déni ou minimisation des violences subies (« T’exagères », « C’est toi le problème »)
L’association Protéger l’enfant et Maître Agathe Morel, conseillons vivement à toute personne témoin de réaliser des attestations.
Ce soutien, qu’il soit d’ordre moral ou juridique, peut faire la différence.
Au pire cela ne pèsera pas dans le jugement mais le soutien moral reste indéniable.
Et au mieux… on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise…
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