La différence cruciale entre lien et contact face à un parent agresseur

La différence cruciale entre lien et contact face à un parent agresseur

Maintenir le lien ou le contact entre un enfant et son parent dangereux ?

Ces deux mots ont l’air voisin mais dans le cadre de violences intrafamiliales, ils ne signifient pas la même chose et ne portent pas aux mêmes conséquences…

  • Le lien fait référence à la connexion biologique, légale ou émotionnelle réciproque qui existe entre un enfant et ses parents ou autres membres de la famille. Ce lien est souvent perçu comme inaliénable et fondamental pour le développement de l’identité de l’enfant. Il est associé à des notions de patrimoine, d’héritage culturel et familial, et d’une continuité à travers les générations.
  • Le contact, en revanche, se réfère à l’interaction physique ou communicationnelle entre un enfant et un membre de sa famille. Il est possible de réglementer, limiter ou superviser ces interactions en fonction de ce qui est considéré comme étant dans le meilleur intérêt de l’enfant.

La distinction entre « lien » et « contact » est fondamentale lorsqu’on aborde la question de la nécessité ou non de maintenir des relations familiales en présence de violences intrafamiliales, entre des enfants victimes et des parents potentiellement dangereux. Cette différence prend une importance cruciale dans le contexte judiciaire et social, où les acteurs de la protection de l’enfance ne sont pas toujours assez formés sur ces notions.

La chercheuse canadienne Suzanne Zaccour explique :

« Les juges et les expert·es vont souvent considérer qu’il faut maintenir le lien père-enfant à tout prix, même en cas de violence familiale. Pourtant, le mythe selon lequel un enfant a absolument besoin de contacts avec ses deux parents, même en cas de violence, a été démenti par les sciences sociales, qui montrent plutôt que l’enfant a besoin d’une relation solide et sécuritaire avec la principale figure parentale.« 

Derrière le choix de maintenir un lien ou stopper le contact, se cache les gros pavés de l’autorité parentale et des droits de visite.

La société a tendance à penser que dès qu’il y a la filiation, il faut qu’il y ait absolument l’autorité parentale + le lien + la rencontre (le contact).

L’argument pour préserver le lien entre l’enfant et l’agresseur repose sur la fausse croyance que chaque parent a un rôle essentiel à jouer dans la vie de l’enfant, indépendamment de son comportement. Cette vision passéiste masque l’impact des violences subies par l’enfant, voire les renforce. Les professionnels devraient savoir que perpétuer un contact parent agresseur/enfant est très nocif, très traumatisant pour les victimes.

On le sait, on le voit, les espaces rencontres ne transforment pas un parent violent en bon parent. De même, le maintien d’un droit de visite est pour l’agresseur la preuve que finalement ce qu’il a fait n’est pas si grave, qu’il n’y a pas de danger, vu qu’il peut continuer le contact avec ses victimes…

Soutenir un parent violent dans sa parentalité au prétexte erroné qu’un enfant a besoin de ses 2 parents pour se développer, c’est faire preuve d’une grande méconnaissance de l’impact des violences faites aux enfants. Un enfant a besoin d’amour et de sécurité. Peu importe le nombre ou l’identité des personnes qui répondent à ces urgences vitales.

Et on revient alors à la différence entre le lien et le contact. Jean Louis Nouvel, pédopsychiatre, précise :

Le lien c’est psychique, le contact, c’est physique”.

Couper le contact est la seule option pour qu’un jour, peut-être, il existe à nouveau un lien en bonne santé.

Si on veut aider les victimes, il faut savoir couper le contact, pendant une période suffisamment longue. L’enfant a besoin du temps de la cicatrisation, de la prise en compte de ses traumatismes, du phénomène d’emprise. Il faut que la peur recule, que la confiance gagne du terrain. Et cela, seul l’éloignement total avec l’agresseur peut le permettre. On n’avance pas dans sa guérison en côtoyant son bourreau. Et les bourreaux ne doivent pas se servir des enfants comme médicaments.

Un jour, si l’enfant est protégé, s’il se sent assez fort, s’il en a envie, il pourra reprendre le lien avec le parent qui le maltraitait.  A son rythme.

D’ici-là, maintenir le contact ne rend service à personne. Ni à l’agresseur qui en retire un sentiment d’impunité et qui peut perpétuer les violences en accusant l’autre parent d’aliénation. Ni aux victimes qui ressortent de ces rencontres avec de la peur, un traumatisme renforcé et une perte de confiance vis-à-vis des professionnels qui ne prennent pas leur parole au sérieux.

La question finale est qui voulons nous protéger ?

Si on veut vraiment aider l’enfant à se « délier » de l’emprise psychologique de l’agresseur, cela passe par une rupture avec l’agresseur.

Les contacts doivent cesser pour préserver le bien-être psychologique de la victime.

Stopper le contact pour garantir que les enfants puissent vivre une vie sans être constamment hantés par les traumatismes passés.

Cela inclut de pouvoir dormir paisiblement, apprendre efficacement à l’école et interagir avec leurs pairs sans être submergés par les souvenirs traumatiques.

La Justice doit comprendre l’importance d’une approche centrée sur l’enfant, où les décisions concernant l’autorité parentale, le lien, le contact, sont prises en tenant compte de leur impact sur la santé mentale et physique de l’enfant, et non pas uniquement sur la préservation des structures familiales traditionnelles ou des droits parentaux.

Témoignage de Françoise, victime d’inceste de la part de ses 3 frères dès l’âge de 10 ans…

Témoignage de Françoise, victime d’inceste de la part de ses 3 frères dès l’âge de 10 ans...

WARNING Attention contenu très sensible

Françoise est une enfant née dans les années 60, son père est boucher, sa mère nounou. Elle mène une enfance représentative de l’époque, ni malheureuse ni heureuse, avec des parents peu présents et peu chaleureux. Dernière enfant d’une famille de 5, c’est la seule fille, elle a donc 4 grands frères. Son père est le second compagnon de sa mère qui a eu un premier enfant à 17 ans, Joël, et qu’elle a délaissé en le confiant à sa propre mère pour aller travailler.

Françoise ne se souvient de rien de spécifique jusqu’à l’âge de ses 10 ans, période qu’elle associe à son premier souvenir d’inceste. Il reste néanmoins possible qu’il se soit passé des choses auparavant qu’elle aurait enfouie dans sa mémoire.

Un jour de ses 10 ans, sa mère s’affaire en cuisine en bas, ses frères sont à l’étage et Françoise s’ennuie.

Assise en haut des marches de l’escalier, elle demande à jouer avec ses grands frères, âgés de 12, 14 et 16 ans, qui sont enfermés dans la chambre. Cette chambre est aussi la sienne car elle dort habituellement dans la même pièce qu’eux dans son lit une place (seul l’ainé a une chambre pour lui tout seul).

Ses frères refusent qu’elle les rejoigne dans un premier temps puis changent d’avis 15 minutes plus tard, comme s’ils avaient réfléchi (ou manigancé ce qui suivra). Ils lui disent : « Si tu veux jouer avec nous, tu dois te laisser faire« . Françoise est toute contente et accepte bien volontiers les conditions. Ils lui demandent alors : « Allonge toi sur le lit« . Puis… ils lui enlèvent sa culotte.

Françoise est surprise mais elle a confiance dans ses frères. Elle voit le plus jeune faire le guet pour vérifier que leur mère reste en bas.

Et puis, les choses dérapent vraiment. L’ainé grimpe sur elle et la viole. Françoise ne comprend rien de ce qui se trame mais elle a mal, elle sent les va et vient dans son corps et elle demande qu’il arrête. Elle se souvient de lui avoir dit « Va-t’en« . Françoise est terrorisée. Le second de ses frères intervient, mais pas pour la sauver : « A moi maintenant” et tente à son tour de la pénétrer. Pareil pour le troisième ensuite mais ils ne savent pas vraiment y faire.

Françoise se souvient qu’ils étaient obsédés par être dedans « le trou » et qu’ils lui demandent sans cesse s’ils étaient “dedans”. Instinctivement, elle comprend qu’elle doit mentir pour se protéger et leur dit qu’ils sont bien dedans… La torture dure longtemps. Ses trois frères se relayeront 2 fois chacun jusqu’à ce que Françoise trouve le courage de dire : « J’entends maman, elle monte…« 

Elle profite de la confusion de ses frères pour remonter sa culotte et se sauver dans le salon. La fillette s’assoit sur un fauteuil, prostrée. Sa mère, qui est dans la cuisine, jette un œil et lui dit « Tu es bizarre« . Françoise ne répond rien, reste figée comme une statue. Ses frères arrivent rapidement après, le plus jeune s’approche d’elle et discrètement, la menace : « Si tu parles, on dira que tu mens et on te cassera la gueule« .

Françoise est persuadée que ses parents ne la croiront pas alors, terrifiée, elle garde tout sous silence.

Dès cet âge, elle culpabilise d’avoir participé à leurs jeux et d’avoir menti, comme si elle était responsable de ce qui lui était arrivé !

Parallèlement, Joël, le 1er enfant de sa mère, est devenu papa d’un petit Laurent. Il revient voir sa mère. L’histoire se répète, Joël et sa compagne abandonnent Laurent à sa mère.

Ils disparaissent pendant des mois. La mère de Françoise finit par aller voir la police pour abandon d’enfant et récupère la garde peu de temps après du jeune Laurent. Ce dernier dort dans la chambre de ses grands-parents durant ses premières années mais quelques mois après le viol de Françoise, ses parents décident qu’il doit déménager et dormir avec les autres enfants.

Il est prévu que Laurent dorme avec le plus jeune des frères de Françoise qui a un lit double. Mais Laurent est souvent malade, il passe des nuits compliquées qui perturbe le sommeil de son oncle. Un jour il vomit abondamment, alors le frère en profite et exige que ce soit Françoise qui dorme avec lui.

Rassemblant son courage, Françoise s’oppose fermement à cette disposition mais rien n’y fait, ses parents acceptent le changement.

Dès la première nuit, le frère tente à nouveau d’abuser d’elle. Il sait que Françoise ne veut pas dormir avec lui alors il met en place un chantage : « Si tu te laisses faire, je dis à Laurent de terminer la nuit dans mon lit et tu retournes dans le tien« . A vrai dire, dans tous les cas, Françoise n’a guère le choix… Et la violence sexuelle se remet en place… Toutes les nuits c’est la même chose. Son frère glisse son sexe entre ses cuisses pour tenter de la pénétrer. Et à chaque fois, elle lui fait croire qu’il y parvient.

Ce manège angoissant, traumatisant, va durer 3 ans. Pendant trois années, TOUTES les nuits, il vient se frotter contre elle et jouir contre son corps.

Ce qui mettra fin à cette horreur est un incident imprévu.

Françoise a 13 ans et ses premières règles arrivent. Elle file prévenir sa mère.

Celle-ci, pour une raison obscure, raconte l’événement à ses frères qui n’hésitent pas à retrouver Françoise pour se fiche de sa tête. Cela met Françoise en colère. Toute sa rage liée à son impuissance, tout ce qu’elle a subi la porte… Elle se lève face à ses frères et assène : “C’est fini, vous ne me toucherez plus ! »

Elle met son énergie à convaincre ses parents et elle récupère la chambre de son frère ainé, fraichement parti du domicile. Les violences sexuelles cessent enfin.

Aussitôt, le cerveau et sa mémoire amnésique font leur travail de protection. Françoise oublie ce qu’elle a subi les dernières années. Ses souvenirs disparaissent en surface.

Mais on sait bien que rien ne disparait réellement. Et le corps prend le relai, en dysfonctionnant, en criant sa douleur autrement.

Françoise grandit comme une cocotte-minute, toujours sous pression, régulièrement malade, apeurée. Il n’y a qu’à l’école puis au travail qu’elle s’épanouit, car elle s’y sent appréciée et reconnue pour ce qu’elle est.

A 27 ans, Françoise fait des crises d’angoisse, son sommeil est très perturbé, elle en vient à vouloir se suicider. Elle en parle à un médecin et au fil de l’eau, elle retrouve la mémoire de ce qu’elle a vécu ! Elle comprend enfin ce qui ne va pas et décide de se soigner, comme elle peut.

Elle participe à des séjours psychiatriques, pratique des séances d’EMDR, consulte des spécialistes… Des années durant, elle traine son mal-être sans trouver de solution miracle.

A la cinquantaine, elle se décide à tout raconter à sa famille, en commençant par sa mère qui lui reproche de ne pas lui en avoir parlé avant…

Elle a également une conversation avec un de ses frères des années plus tard, celui qui lui a fait subir des agressions sexuelles pendant 3 ans. Il reconnait son comportement et s’excuse, pensant ainsi être absout. Les autres diront plus tard ne pas s’en souvenir…

Alors il y a 6 mois, Françoise a décidé d’aller en justice, presque symboliquement. Elle se sent comme dépossédée de sa vie. Pour elle, ses frères ont tout eu, maison, femmes, enfants, petits-enfants. De son côté, tout a été compliqué, ses amours, sa sexualité… Françoise se sent seule.

Elle veut témoigner ici pour que sa parole aide d’autres victimes d’inceste de son âge, pour qu’elles trouvent le courage de dénoncer à leur tour les horreurs subies !

Le procureur de la république a transféré le dossier pour une enquête. On espère que la loi sur la prescription changera. Françoise demande justice !


Vous trouverez sur ce site d’autres témoignages d’anciennes victimes devenues majeures, elles témoignent courageusement de leur parcours chaotique : Ana Madet, victime d’inceste de la part de son père de ses 5 ans à ses 17 ans et Pierre, 39 ans, ancienne victime de violences sexuelles, physiques et psychologiques, assigne l’État pour fautes lourdes et déni de justice .

L’EMDR, une solution pour guérir des traumatismes ?

L'EMDR, une solution pour guérir des traumatismes ?

L’EMDR est une thérapie cognitive spécialisée dans le traitement des traumatismes.

Ses initiales correspondent à Eye movement desensitization and reprocessing, ce qui se traduit par Désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires.

Comme souvent en science, la découverte de l’EMDR a été faite par hasard. En 1987, une psychologue américaine, Francine Shapiro, observe que ses «petites pensées négatives obsédantes» disparaissent quand elle fait aller et venir rapidement ses yeux de gauche à droite.

Elle creuse alors le sujet et met au point une méthode qui consiste «à faire effectuer une série de mouvements oculaires à un patient souffrant d’un traumatisme afin de le déconnecter de souvenirs et d’émotions négatives qui en résultent».

Elle en conclut que ça aide le patient à gérer son syndrome lié à ce choc traumatique, voire à le «guérir».

Méthode largement utilisée aux USA, elle peine à être déployée en France. Son efficacité a été pourtant validée par la Haute Autorité de Santé en 2007, par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) en 2013, puis par l’Inserm en 2015.

Des survivants des attentats du Bataclan, patients emblématiques traités par EMDR, témoignent aussi de ses bienfaits. Sur la page Facebook de l’association de victimes Life for Paris, certains n’hésitent pas à la recommander.

Comment ça fonctionne ?

  • Les mouvements oculaires activent le travail de cicatrisation psychique.
  • L’EMDR exploite les facultés du cerveau à transformer les informations à l’origine d’un traumatisme.
  • Le souvenir traumatisant est dissocié de l’émotion négative. En gros, le souvenir reste, mais pas la souffrance associée.
  • Le patient prend de la distance avec le traumatisme.

Les points positifs de cette méthode :

  • Méthode peu contraignante pour le patient. Pas besoin d’un « lâcher-prise » pour agir.
  • La thérapie EMDR est envisageable à tout âge.
  • Effets souvent spectaculaires pour les traumatismes psychiques (mais pas chez tous les patients).
  • L’EMDR peut aussi être utilisée dans des cas de dépression, d’angoisse et d’anxiété par exemple.
  • C’est une thérapie courte vers une psychanalyse. Quelques séances peuvent suffire.

Les points négatifs de l’EMDR :

  • Pendant la séance, le patient peut éprouver des moments de gêne, suite à la libération de souvenirs.
  • Après la séance, le « re-traitement » de l’information émotionnelle peut continuer de se faire par lui-même (rêves, fortes émotions, nausées, vertiges), signe qu’un travail en profondeur est en train de s’opérer.
  • Une personne ayant des problématiques enfouies n’a pas d’intérêt à aller « les réveiller » si elles ne sont pas douloureuses.
  • On déconseille la méthode aux personnes ayant des problèmes psychiatriques et psychotiques (psychose, schizophrénie) à cause d’une possible décompensation.
  • Pas d’étude sur son efficacité en préventif.

Pas de conclusion de notre part sur la science toute jeune de l’EMDR.

On constate simplement que les victimes de violences intrafamiliales utilisent de plus en plus cette thérapie contre leur psycho-traumas et la présentent comme accélérée et efficace.

A l’heure où les victimes sont trop souvent abandonnées par la société, cette piste et ses résultats semblent encourageants.

Il reste néanmoins essentiel de bien choisir son thérapeute pour s’assurer de la qualité des soins.

Nous vous conseillons cet article : https://sante.journaldesfemmes.fr/fiches-sante-du-quotidien/2598946-emdr-methode-signification-risques-tarif-technique/

Nous vous conseillons également la lecture de l’article « Les psycho-traumas des victimes de violences« .


Repérer, prévenir et agir contre les violences sexuelles faites aux enfants

Repérer, prévenir et agir contre les violences sexuelles faites aux enfants

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Les Chiffres

On estime que 160000 enfants sont victimes d’agressions sexuelles chaque année en France.(i)

8% seulement des jeunes victimes qui ont osé parler sont protégées et l’agresseur n’est éloigné de la victime que dans 6% des cas !(ii)

10% des français déclarent avoir été victime d’inceste (iii)

Moins de 4% des viols sur mineurs font l’objet d’une plainte (iv) . 70% de celles-ci sont classées sans suite (v) selon le ministère de la justice.

En conclusion, la prise en charge des enfants victimes de violences sexuelles est gravement défaillante en France !

Si les enfants méritent sans conditions respect, bienveillance et protection, de nombreuses études pointent aussi le lien entre les violences subies dans l’enfance, les troubles graves de la personnalité et la criminalité. En conséquence, la protection de l’enfance est donc également un impératif pour prétendre vivre dans une société paisible.

Reconnaitre les signes de maltraitances (vi)

Attention, un signe pris seul ne veut pas forcément dire qu’il y a maltraitance, mais un soupçon légitime reposera sur un faisceau d’indices concordants[vii].

Manifestations somatiques

  • Maladies répétées, fatigue, pâleur
  • Énurésie, encoprésie
  • Arrêt du développement physique (courbe de poids) ou intellectuel
  • Contractures musculaires entrainant des douleurs (fibromyalgie, névralgie…)
  • Et progressivement : Maladies auto-immunes, troubles cardio-vasculaires, digestifs, pulmonaires, immunitaires, endocriniens. Cancer, diabète, hyper tension artérielle…

Difficultés scolaires

  • Absentéisme important
  • Désinvestissement
  • Échec
  • Manque de concentration
  • Problèmes de mémoire
  • Interruptions de la pensée, car l’enfant est littéralement « envahi » psychiquement par son agresseur
  • Enfant harcelé (habitude à être dominé, à se dissocier) ou harceleur (identification à l’agresseur).
  • Évitement de certaines situations scolaires ou sportives
  • Mais aussi : hyper adaptation, Beaucoup d’enfants subissant des agressions sexuelles, vont être très bon à l’école (cf dans le chapitre Protéger les victimes).

Comportementaux inadaptés

  • Désordres alimentaires (anorexie, boulimie, vomissements répétés)
  • Manque d’hygiène
  • Marques corporelles (traces de coups, brûlures, fractures, scarifications)
  • Difficulté à gérer les émotions
  • Violence ou agressivité envers les autres (Identification à l’agresseur) et notamment envers son parent protecteur. Effectivement, comme l’explique Dr Alvarez à la fin de l’interview de Hanna Dam Stokholm [viii], l’enfant maltraité va s’ajuster aux attendus parentaux. Il en va de sa survie. Si un enfant a vu son père frapper sa mère, il pourra reproduire ce schéma, d’autant plus si, après un long parcours judiciaire, le parent maltraitant est « gagnant » aux yeux de la justice.
  • Violence ou agressivité envers eux-mêmes : automutilation.
  • Désocialisation avec ses pairs, dérive anti-sociale
  • Mutisme, inhibition, repli sur soi
  • Mauvaise estime de soi
  • Quête affective systématique
  • Fugues répétitives
  • Peurs inexpliquées
  • Prise de risque (fugue, conduites addictives…)
  • Accidents domestiques à répétition
  • Comportement ou langage sexuel inadaptés à son âge
  • Pensées suicidaires

Difficultés scolaires

  • Absentéisme important
  • Désinvestissement
  • Échec
  • Manque de concentration
  • Problèmes de mémoire
  • Interruptions de la pensée, car l’enfant est littéralement « envahi » psychiquement par son agresseur – cela s’appelle l’identification à l’agresseur ou syndrome de Stockholm)
  • Enfant harcelé (habitude à être dominé, à se dissocier) ou harceleur (identification à l’agresseur).
  • Évitement de certaines situations scolaires ou sportives

Les conséquences des violences sexuelles sont désastreuses sur la santé mentale et physique

Les pathologies somatiques (x)

  • Troubles immunitaires, endocriniens, cardio-vasculaires (hypertension artérielle), digestifs (constipation…), pulmonaires.
  • Diabète, fibromyalgie, cancer…

Les conséquences psycho traumatiques

« Plus les traumatismes dans l’enfance se cumulent, plus les conséquences à l’âge adulte seront graves. » (xi)

TSPT : Trouble de stress post traumatique (xii) , expliqué par Murielle Salmona par la Mémoire Traumatique (xiii)

Ce trouble peut se manifester dès lors d’un traumatisme unique.

A cause des Flashbacks, les victimes peuvent revivre sans cesse l’agression passée comme si elle était en train de se reproduire, les obligeant à adopter des conduites d’évitement ou dissociantes, mettant parfois leur entourage ou elles-mêmes en danger, pour éviter ce nouveau trauma !

Troubles comorbides post-traumatiques

  • Souffrances physiques avec les troubles somatoformes (maux de ventre, nausées, maux de tête, douleurs pelviennes…),
  • Souffrances psychiques avec les troubles anxieux, les dépressions, les tentatives de suicide
  • Comportements addictifs (alcool, drogue…)
  • Troubles alimentaires (boulimie et anorexie)
  • Troubles dissociatifs (anesthésiant pour échapper aux reviviscences anxieuses ; anesthésie émotionnelle permettant le passage à l’acte)

Troubles de la personnalité « personnalité traumatique complexe » 

-Violence envers les autres : Quand une victime est « envahie psychiquement » par son agresseur (identification à l’agresseur ou syndrome de Stockholm), il peut développer les mêmes violences sur les autres.

Cette identification à l’agresseur est également expliquée par Muriel Salmona avec la Mémoire Traumatique. Par exemple la victime peut garder les souvenirs de l’agresseur mélangés avec ses propres souvenirs. Cela peut donner lieu à des situations effrayantes telles que cette femme victime d’agression sexuelle, qui pendant une audience, s’est mise à produire un rire démoniaque, qui était en fait celui de l’agresseur (xiv) .

Certaines mères de l’association Protéger l’Enfant nous rapportent des faits troublants concernant leur enfant devenu jeune adulte. Les accès de violence des jeunes adultes, au prise avec une telle colère de ne pas avoir été protégé et ayant intégré la violence pendant toutes les années de construction psychique, mettent en danger leur parent protecteur.

Séparer la victime de son agresseur est donc important au-delà de mettre fin à la maltraitance.

-Mise en danger, violence envers soi-même (automutilation, tendances suicidaires, hyper sexualisation…)
-Comportements criminels,
-Abus de toxique
-Problèmes émotionnels, relationnels
-Difficultés scolaires ou professionnelles

Trouble de l’attachement (xv)  : conséquences de la séparation mère-bébé sur le psychisme naissant des enfants

Un enfant subissant des conduites incestueuses n’a pas d’autre choix que s’attacher au parent agresseur. Nécessité adaptative comparable à celle d’un otage vis-à-vis de son agresseur (syndrome de Stockholm).

Ces pseudo-attachements alimentent le déni et la théorie de l’inceste heureux.

Les troubles de l’attachement précoces perturbent la structuration de la personnalité des enfants qui les subissent :

  • Age préscolaire : comportement adhésif à la figure d’attachement principale, phobie scolaire et/ou absence d’intérêt pour découvrir de nouvelles expériences infantiles
  • Adulte : troubles anxieux, états dépressifs
  • Certaines pathologies psychiques
  • Troubles limites de la personnalité, troubles dissociatifs

Cela complique les possibilités de reconstruction des survivants de l’inceste. Le thérapeute doit devenir une figure d’attachement suffisamment sécure.

La victime va développer des stratégies pour se protéger ponctuellement, mais qui sont néfastes à long terme si le traumatisme n’est pas traité

Le déni protecteur ou amnésie dissociative

D’après Isabelle Aubry de Face A l’Inceste : la victime va réprimer les faits traumatisants jusqu’à l’oubli total ou non. Effectivement, une victime peut être dans le déni tout en gardant la mémoire. Cette amnésie est parfois renforcée par le silence et le déni de l’entourage de la victime.(xvi)

La dissociation traumatique (xvii)

C’est une sorte d’anesthésie émotionnelle qui se produit pendant l’évènement traumatique ou après l’évènement traumatique. Dans ce deuxième cas, cette stratégie de protection va se développer lorsque la victime va se sentir émotionnellement débordée par une situation rappelant le traumatisme. Pour provoquer cette dissociation, la victime peut développer des conduites à risque (troubles cités précédemment).

Dans le cas des mutilations, pour une personne de plus de 16 ans ou pour un enfant n’ayant pas atteint la puberté, si elle présente plusieurs types de lésions corporelles, rechercher systématiquement la maltraitance.

Le clivage (xviii) : pour Sigmund Freud, il s’agit d’un mécanisme de défense et de l’état du moi qui en résulte. Il consiste dans le maintien de deux attitudes contradictoires et qui s’ignorent à l’égard de la réalité en tant qu’elle contrarie une exigence pulsionnelle. L’une de ces attitudes tient compte de la réalité, l’autre la dénie.

Les conséquences comportementales (xix)

Répétition littérale

Les victimes ont tendance à rejouer leur scénario traumatique,

-soit en tant que victime (les personnes continuellement agressées dans leur couple, au travail, par les institutions ; prostitution),

-soit en tant qu’agresseur (d’où les lignées d’agresseurs avec l’identification à l’agresseur)

Remarque : les femmes violées dans leur enfance ont fréquemment des relations sexuelles avec leur thérapeutes !

Contre attitude de rejet

Les victimes vont provoquer dans leur entourage une « contre-attitude de rejet », que ce soit dans un univers privé, professionnel, médical, social, avec la justice. Il faut reconnaitre ce type de réaction pour ne pas rejouer le scénario traumatique avec une victime et éviter les maltraitances institutionnelles.

Les traumatismes de l’inceste vont provoquer l’exacerbation de certains sentiments néfastes à une vie sereine

– La colère les victimes d’agression sexuelle sont souvent irritables

La culpabilité : retournement de la colère contre soi, ou sentiment d’être acteur et non objet. Ce sentiment est provisoire et protecteur, mais sera destructeur à long terme.

Attention à la culpabilisation qui est une manipulation perverse consistant à reporter la faute sur la victime. Cela encourage la culpabilité ! Le violeur peut transmettre sa culpabilité à sa proie !

-La honte : est liée à la peur du rejet social.

-Le sentiment d’être vulnérable et qu’aucune aide n’est possible pour eux. Ils n’ont aucune confiance en eux

La peur : le monde leur paraît dangereux et les gens peu fiables. Grandir dans un environnement hostile provoque la peur des autres, ce qui est un lourd handicap social, impactant la vie professionnelle et personnelle.

-Difficulté de se projeter dans l’avenir

La grande majorité des toxicomanes, des personnes qui se prostituent, les SDF, les chômeurs longues durées, les délinquants multirécidivistes, ont subi des maltraitances dans l’enfance. Comme précédemment dit, de nombreuses études font le lien entre les violences subies dans l’enfance, les troubles graves de la personnalité et la criminalité.

Conséquences des violences sexuelles sur les survivants de l’inceste versus population générale selon le sondage IPSOS pour l’AIVI (FAI)

Population généraleSurvivants de l’incesteMultiplication
Dépression (passé + présent)56%98%1,75
Addictions :   
>10 cigarettes/jour44%55%1,25
>3 verres d’alcool/jour17%30%1,76
Prise de drogue chaque semaine9%27%3
Troubles compulsifs alimentaires (anorexie, boulimie)9%76%8,44
Suicide :   
Pulsions, idées suicidaires14%86%6,14
Tentatives de suicide8% selon la DREES53%6,6
Tempérament irritable, colérique53%92%1,74
Automutilation (passé + présent) 41% 

Protéger les victimes

D’après la psychologue Evelyne Josse (vi) , dans de nombreux cas, les agressions sexuelles n’entrainent pas de séquelles physiques et dans plus de 30% des cas, les enfants ne manifestent pas de réactions préoccupantes au moment des faits (l’enfant peut même montrer des capacités de développement accrues, en matière de langage, à l’école, dans les relations sociales).

Cependant si des signes préoccupants apparaissent brusquement ou si un enfant se confie à vous au sujet des agressions qu’il subit, la Haute Autorité de Santé (vii) recommande de faire un signalement (viii) auprès du procureur de la République. On peut aussi demander une hospitalisation, avec ou sans l’autorisation des parents, si la situation le nécessite, afin de démarrer la chaine de protection de l’enfant. Si les parents refusent l’hospitalisation, le médecin peut demander une Ordonnance de Placement Provisoire (OPP) au procureur de la République.

Sinon, dans le doute, on peut également appeler la CRIP (Information Préoccupante, moins rapide que le signalement) ou le 119.

Quels recours ont les victimes pour s’en sortir ?

D’après Muriel Salmona, (xx) les troubles psycho traumatiques représentent au moins 70% de la psychiatrie et malheureusement, les psychiatres ne sont pas toujours formés à la traumatologie. Cela limite grandement les chances des victimes de s’en sortir !

Soins psychothérapeutiques et soutien socio-juridique, intimement liés !

Le principal enjeu pour s’en sortir est l’accès aux soins psychothérapeutiques, en plus des soins médicaux concernant les soins du corps. La victime aura besoin d’un thérapeute formé aux psychotraumatismes et à la victimologie. (xxi)

Les soins psychothérapeutiques doivent être accompagnés d’un bon soutien sociojuridique. Effectivement, une victime qui ne serait pas protégée ou pas reconnue comme victime, aura peu de chance de guérir ou soulager ses traumatismes par les soins psychotérapeutiques.

La victime et son parent protecteur doivent donc être crus. Sachant que les fausses allégations d’agression sur enfant sont marginales (cf plus loin, stratégie de l’agresseur, SAP), il faut garder en tête la présomption de crédibilité du parent protecteur.

La protection passe par la séparation de la victime d’avec son agresseur. J’insiste sur ce point car en cas d’inceste, cela ne semble pas évident pour tout le monde. D’ailleurs il est bien précisé par la CIIVISE (xii) qu’il n’est pas envisageable de prodiguer utilement des soins à un enfant victime encore contraint de rencontrer son agresseur. De plus, d’après le juge Durand, il faut interdire d’imposer à l’enfant d’aller voir son parent agresseur. (xiii)

Une victime qui aura subi une agression sexuelle unique (un traumatisme unique) aura besoin de traiter principalement un Trouble du Stress Post Traumatique.

La HAS recommande dans ce cas d’utiliser certaines techniques comme :

-La thérapie médicamenteuse (pharmacologique), qui sera également utile en cas de dépression

-Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) : thérapies psychologiques à court terme basées sur l’observation et la régulation des liens entre les pensées, les émotions et les comportements (xxiv)  ; pratiquées par les psychiatres ou psychologues formés.

-Les thérapies psychodynamique : issue et principalement influencée par la psychanalyse.

-L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) : désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires.

Ce sont des thérapies brèves qui vont traiter les symptômes comme les troubles intrusifs ou les stratégies d’évitement.

Dans le cas d’une victime ayant subi des agressions répétées sur un temps long, il faudra en plus un suivi sur le long terme pour prendre en charge les autres traumatismes complexes. Il faut donc une thérapie « relationnelle ». Et là, la qualité de la relation qui s’installe entre le survivant et son thérapeute sera un facteur déterminent de réussite, plus que le savoir-faire technique du thérapeute. Le thérapeute va négocier un cadre thérapeutique avec son patient. Il va utiliser des techniques de gestion des émotions pour subvenir aux réactions liées à l’évocation du scénario traumatique. « Le traitement par la parole ne sera possible que lorsque le cerveau émotionnel sera suffisamment reconnecté au cortex frontal »

La Résilience (xxv)

La résilience est la capacité d’une personne ou d’un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir, en présence d’événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères. Cette résilience n’est jamais acquise définitivement. Il s’agit d’une capacité qui résulte d’un processus dynamique, évolutif, au cours duquel l’importance d’un traumatisme peut dépasser les ressources du sujet.

Les facteurs de protection déterminant la résilience sont :les relations affectives, (…)la possibilité de créer des réponses positives avec son entourage, l’approche active pour mieux résoudre les problèmes, et enfin que la vie a un sens et que ce sens est positif. (xvi) On peut aussi rajouter tout ce qui favorise les liens sociaux (cohésion, groupe, forte idéologie).

D’après Michel Manciaux, le premier (risque d’utiliser ce concept) est un manque de rigueur dans l’interprétation des faits observés, amenant à voir la résilience là où il y a seulement déni d’un traumatisme,…Désormais à la mode, le concept de résilience pourrait souffrir de se voir mis en avant sans assez de capacité de discernement, de finesse clinique. Le risque d’utilisation de ce concept est le désengagement des pouvoirs publics. Puisque certains se « tirent d’affaire » par eux-mêmes, point n’est besoin de les aider. Quant aux autres, ce sont des incapables ou des paresseux 

Il suffit d’assister à une rencontre de victimes d’agressions sexuelle et d’inceste (par exemple avec la CIIVISE) pour se rendre compte que beaucoup de victimes, sous couvert de résilience, n’ont souvent pas été écoutée et donc pas protégée lorsqu’elles ont subi leur traumatisme.

Comme le souligne Isabelle Aubry et Gérard Lopez, le concept de résilience peut être confondu avec la résistance ! Effectivement, une personne traumatisée peut « devenir un sujet dépourvu de sensibilité ou un brillant intellectuel dissocié de ses émotions ». On peut effectivement apprécier la résilience « à la mesure de l’efficacité sociale », celle-ci pouvant se faire au détriment de la vie personnelle.

La parole de l’enfant

D’après le juge pour enfants, coprésident de la CIIVISE, Edouard Durand « Les enfants (victimes) sont des gens sérieux, qui vivent leur vie sérieusement  (xxvii) . Croire l’enfant est un principe de précaution (xxviii) . » « Les enfants sont une source d’information fiable (xxix)  ». Si un enfant ne dit pas toute la vérité, il aura tendance à minimiser les violences qu’il a subies, voire à se taire, pour ne pas dénoncer la figure parentale ou autre, plutôt qu’à les accentuer et les inventer. Par exemple, dans l’affaire d’Outreau, les enfants ont bien été reconnus comme victimes, même si leur version avait des lacunes à cause de l’emprise parentale qu’ils subissaient.

Il existe deux protocoles très efficaces pour aider les enfants à mieux répondre aux interrogatoires pour le premier et à lui donner confiance pour le deuxième :

-NICHD (National Institute of Child Health and Human Development) : l’objectif du protocole NICHD est de diminuer la suggestibilité des intervieweurs et d’adapter leurs questions en fonction des capacités des enfants et d’aider ceux-ci à fournir un récit plus riche et plus détaillé tout en étant exact.

 (cf dans le paragraphe « formation aux violences sexuelles)

-CALLIOPE (xxx)  : Ce projet est soutenu et importé du Canada par le comité Alexis Danan de Bretagne. Calliope est un programme d’accompagnement de la parole de l’enfant, victime ou témoin, dans les procédures judiciaires afin de l’outiller pour lui donner confiance, le rassurer et faciliter son témoignage devant la justice.

Les stratégies de l’agresseur

D’après le juge Durand, Si on veut lutter contre la violence, il faut la penser. Si on veut lutter contre la stratégie des agresseurs, il faut la connaître, l’identifier. (xxxi)

L’agresseur va effectivement utiliser des ressources qui sont maintenant bien connues :

1 – Syndrome d’Aliénation Parentale (SAP) et Aliénation Parentale

Le SAP utilisée comme stratégie de défense

Le parent incestueux (souvent le père), acculé par une révélation publique, va chercher à décrédibiliser la parole de l’enfant et celle du parent protecteur en se faisant passer pour la victime. Il accusera l’enfant de mentir sous l’influence et la suggestion du parent protecteur. L’exemple le plus courant est celui de la mère accusée par le père d’avoir mis en tête de l’enfant une histoire d’abus sexuel pour obtenir sa garde exclusive.

Cette stratégie de contre-attaque s’avère encore malheureusement très efficace. 

L’idée de la mère menteuse et manipulatrice a été théorisée par un pseudo scientifique sous le terme de « Syndrôme d’Aliénation Parentale » (SAP) et elle a trouvé depuis beaucoup d’écho dans les salles d’audience. Ce procédé de défense de l’agresseur étant, par ailleurs, largement exploité par certains avocats peu scrupuleux ou peu instruits, avec succès.

Le SAP est devenu une parade infernale pour museler la parole de la victime et de son parent protecteur, nier les faits et échapper aux sanctions. Pire, elle va permettre à l’agresseur de retourner la situation. Il y aura inversion de la culpabilité !

Aux yeux de la justice, le parent protecteur (souvent la mère), traumatisé et déstabilisé par la révélation de l’enfant, va paraitre fragile, toxique et malsain alors que le parent agresseur, nullement déstabilisé par les révélations de son enfant, va sembler équilibré, de confiance, de telle sorte qu’on va souvent finir par lui donner la garde exclusive de l’enfant !

L’origine du SAP

On parle d’aliénation parentale lorsqu’un des parents influence l’enfant afin de favoriser chez lui son rejet ou sa désaffection à l’égard de l’autre parent. C’est un phénomène marginal dans les affaires de violences intrafamiliales (xxxii) . Effectivement, selon Mémoire Traumatique et Victimologie (xxxiii) :

« … les fausses allégations de violences sexuelles chez les personnes qui portent plainte sont rares. Une étude conduite aux États-Unis en 2010 les estime à moins de 6 %, une autre de Rumney en 2006, les estime de 3% à 8%, et une étude de Trocmé qui analyse les fausses allégations de violences sexuelles commises sur des enfants les évalue à 6%, ces dernières ne sont pas le fait des enfants mais surtout de proches voisins et de parents qui n’ont pas la garde de l’enfant. »

Il faut donc toujours garder en tête la présomption de crédibilité du parent protecteur dénonçant l’inceste.

Le pseudo « Syndrome d’Aliénation Parentale » ou SAP, a été inventé par Richard Gardner (xxxiv) , un psychologue américain qui soutenait ouvertement la pédocriminalité (xxxv) .

Il gagnait sa vie comme expert psychologue, soutenu par des avocats qui défendaient principalement des pères accusés d’abus sexuels sur leurs enfants. Il était grassement payé à chaque victoire.

Le SAP a longtemps été enseigné à l’Ecole Nationale de la Magistrature (ENM) par des psychologues suiveurs de Gardner, d’où sa large diffusion et son influence dans le monde de la justice et du social.

Le SAP n’est reconnu par aucune instance scientifique sérieuse (ni le DSM5 aux Etats-Unis, ni l’OMS, ni aucun état, ni le monde de la recherche internationale) et n’a jamais été édité dans une revue scientifique sérieuse (uniquement à compte d’auteur).

Le SAP est donc infondé et souvent utilisé pour décrédibiliser les parents protecteurs d’enfants incestés (en général les mères), au même titre que le syndrome de Münchhausen, le syndrome des faux souvenirs, le complexe d’Œdipe, le référentiel « Outreau », parents souvent injustement accusés d’être manipulateur, toxique, menteur et également d’entretenir un conflit parental, alors qu’ils ne sont que sidérés ou traumatisés par ce que subit leur enfant.

Il semble qu’il y ait une corrélation très fréquente entre accusation de SAP et les révélations d’inceste ou de violences en général, car sinon, dans les affaires portées à la connaissance des associations de protection des enfants, cette accusation serait utilisée beaucoup plus tôt dans les procédures notamment en matière de violences conjugales.

D’ailleurs, selon l’action 58 du 5ème plan de mobilisation et de lutte contre toutes les violences faites aux femmes 2017-2019, mis en place par le gouvernement, le syndrome d’aliénation parentale est ainsi critiqué :

Informer sur le caractère médicalement infondé du « syndrome d’aliénation parentale » Dans les cas de violences conjugales ou de violences faites aux enfants, l’allégation du « syndrome d’aliénation parentale » soulève de réelles difficultés. Elle conduit à décrédibiliser la parole de la mère, exceptionnellement du père ou de l’enfant, et par conséquent à en nier le statut de victime en inversant les responsabilités.

Or, aucune autorité scientifique n’a jamais reconnu un tel « syndrome » et le consensus scientifique souligne le manque de fiabilité de cette notion. Il n’est reconnu ni par le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM5) ouvrage de référence de l’association américaine de psychiatrie (APA), ni par la classification internationale des maladies publiée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La recherche démontre que les fausses allégations de maltraitance ou de négligences sur les enfants sont marginales (xxxvi).

2 – La Projection

Selon la psychothérapeute et psychanalyste Caroline Bréhat, lorsqu’un homme violent accuse son ex-conjointe « d’aliénation parentale », il importe d’investiguer la situation car les personnalités violentes ont souvent développé des mécanismes de défense archaïques tels que l’identification projective appelée projection.

La projection est, selon la psychanalyse, un mécanisme de défense inconscient qui permet de rejeter la faute (craintes ou désirs vécus comme interdits) sur l’autre. Les pères violents, adeptes de ces mécanismes de défense, accusent les femmes d’être fusionnelles et aliénantes parce qu’ils ne peuvent reconnaître consciemment que ce sont eux qui ont un comportement fusionnel et aliénant. Selon   l’American Psychological Association : « Les agresseurs intrafamiliaux projettent très habilement la faute sur leurs victimes. » (xxxvii)

3 – L’emprise

D’après le juge Durand, Ce que cherche l’agresseur (intrafamilial), c’est le pouvoir sur l’autre, c’est créer une emprise. Il ne supporte pas l’autonomie de sa conjointe ou de ses enfants.(xxxviii)

La psychiatre Marie-France Hirigoyen parle de l’emprise en ces termes :

« L’emprise est un phénomène de violences psychologiques qui s’installent dans le temps… Un brouillage s’opère (car) des choses agréables sont dites, suivies par des choses déplaisantes…La personne sous emprise qui reçoit ces dénigrements va les intégrer, se dire « c’est vrai ». Sur le registre cognitif, ces messages contradictoires ont un effet paralysant sur le cerveau. Ce brouillage entraine la perte de l’esprit critique. Les personnes sous emprise ne savent plus à quel moment réagir. Vulnérables, ça les amène à se laisser soumettre. » (xxxix)

4 – Pour empêcher la victime de parler, l’agresseur utilisera facilement le chantage, les menaces, le mensonge

…avec des paroles du type « si tu parles…cela va détruire la famille, je risque d’aller en prison, tous les parents font ça quand on aime ses enfants (confusion entre sexe et amour filial), c’est un secret entre nous, personne ne te croira… »

Une stratégie courante de l’agresseur intrafamilial

D’après le juge Durand : (L’agresseur) recherche sa proie. Il l’isole, il crée un climat de tension et de peur. Il inverse la culpabilité. Il impose le silence. Il recherche des alliés. Et finalement il assure son impunité. (xl)

D’après Faller, Les agresseurs familiaux font généralement preuve d’une grande habileté à impressionner les administrations, ils sont souvent charmants, et difficiles à démasquer.(xli)

Le parent maltraitant présumé est (considéré comme) le plus stable et la mère comme la cause des troubles plutôt que comme une femme qui réagit à la détresse de ses enfants (xlii) .

Le pouvoir de l’agresseur et la possibilité de passage à l’acte criminel sont accentués par la proximité avec l’enfant. (xliii) Ce qui explique, entre autres, le fort taux d’inceste.

5 – Existe-t-il un inceste heureux (xliv) ? NON

D’après Cyrulnik, quand l’attachement ne se fait pas ou mal (séparation durable ou proximité trop grande provoquant une fusion-confusion des sentiments), l’interdit de l’inceste n’empêche pas la réalisation des désirs sexuels. De plus, il estime que les discours sociaux ne sont pas clairs et les interdits ne sont donc pas clairs non plus !

Comme l’expliquent Isabelle Aubry et Gérard Lopez (xlv) , l’inceste heureux est parfois plaidé lors des procès mais cette théorie ne tient pas la route quand on examine les survivants : ils présentent quasiment tous « des troubles de l’attachement et des problèmes psychologiques, somatiques et sociaux, caractéristiques de l’emprise psychologique ». « Il serait criminel d’aider un enfant à s’adapter coûte que coûte à une famille maltraitante. Il faut au contraire l’encourager à trouver des facteurs extra-familiaux favorables » et l’aider à fabriquer du lien social. Un bon accompagnement social et judiciaire constitue un facteur de protection.

Dorothée Dussy (xlvi) , anthropologue et directrice de recherche au CNRS, explique également que « l’argument du bonheur est l’apanage des violeurs ». Effectivement, les témoignages de relations sexuelles vécues dans l’enfance sont toujours exprimés sous forme de plaintes. Il n’y a que les fictions pour mettre en scène un inceste heureux. Elle n’a d’ailleurs jamais rencontré quelqu’un qui ait subi un inceste et qui aille bien (xlvii) .

Même si beaucoup d’agresseur d’enfants aiment s’en vanter, non il n’existe pas d’inceste heureux.

La formation aux violences sexuelles

  • Toute personne réalisant des enquêtes, expertises, entretiens ou auditions d’enfants victimes, peut se former au protocole NICHD (National Institute of Child Health and Human Development) pour aider à la révélation des violences subies. C’est une technique canadienne, expliquée par l’ONPE ou Mireille Cyr, actuellement enseigné dans la police et la gendarmerie pour qu’il soit utilisé dans les salles Mélanie entre autres. D’après la CIIVISE, cette technique permet d’obtenir des témoignages particulièrement fiables et de grande qualité car elle évacue le faible risque de fausses allégations. (xlviii) : http://nichdprotocol.com/french.pdf
  • Il existe aussi le protocole CALLIOPE enseigné par le comité Alexis Danan de Bretagne. (cf la parole de l’enfant)
  • Toute personne désirant mieux connaître les bases de la connaissance en matière de violence sexuelle, peuvent suivre une formation gratuite sur deux jours avec l’association Stop aux Violences Sexuelles (SVS).  Des formations destinées aux professionnels sont également proposées avec cette association : https://www.stopauxviolencessexuelles.com/formations-2/
  • Toute personne désirant approfondir ses connaissances en matière de violence au sein du couple, l’impact sur les enfants et les violences sexuelles, peuvent se procurer gratuitement les 4 kits de formation proposés par le gouvernement et réalisés par la MIPROF (mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains). : https://arretonslesviolences.gouv.fr/je-suis-professionnel/outils-violences-au-sein-du-couple
  • Beaucoup d’associations proposent des formations en lignes :
  1. -Mémoire Traumatique et Victimologie : https://www.memoiretraumatique.org/publications-et-outils/module-de-formation-interactif-sur-les-violences-sexuelles-faites-aux-enfants.html
  2. -Association Une vie : https://1vie.org/formation-web/
  3. -Brochures d’informations de Mémoire traumatique et victimologie : https://www.memoiretraumatique.org/publications-et-outils/brochures-d%E2%80%99information.html

La prévention auprès des enfants grâce à des supports gratuits

-« J’apprends à me protéger des abus sexuels » (association une vie) : https://nonono.help/?lang=fr

-« Quand on te fait du mal » (Mémoire Traumatique et Victimologie) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/2022-quand-on-te-fait-du-mal_ponti-memoire-traumatique-hdweb.pdf

-« Le loup » de Mai Lan Chapiron : www.leloup.org

La chanson : https://www.youtube.com/watch?v=YpHQppQtzZk

Le livre (en vente, il n’est pas gratuit)

La vidéo de prévention : ton corps est à toi, c’est toi le chef ! https://www.youtube.com/watch?v=NtF4RbquGQo&t=20s

-Mon corps, c’est mon corps :

Film éducatif réalisé en 1986, pour prévenir des agressions sexuelles, diffusé dans les écoles du Québec. https://www.youtube.com/watch?v=Ewr9PtwtJ8w

Guide d’utilisation : https://www.youtube.com/watch?v=Ewr9PtwtJ8w

-Lumni : l’audiovisuel public au service de l’éducation pour les élèves (les enfants de 3 à 20 ans) mais aussi les enseignants et les éducateurs (Arte, France Médias Monde, France Télévisions, INA, Radio France et TV5 Monde)

https://www.lumni.fr/dossier/les-violences-sexuelles-sur-mineurs

L’aide aux victimes de violences

-Numéro d’aide aux victimes 116006

-Violences Femmes Info 3919

-D’autres numéros utiles sur le flyer de Mémoire traumatique (ci-joint) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/201806-Brochure_victimologie.pdf

-et spécialement pour le cadre d’enfants victimes d’agressions sexuelles intrafamiliale :

Association protéger l’enfant : https://www.protegerlenfant.fr/[xlix] (Contact)

Plusieurs associations de soutien (liste non exhaustive) sont recensées sur le site Sous le Regard d’Hestia : https://sousleregarddhestia.com/ [l] (Suspicion de Violences Intrafamiliales/ se renseigner)

Le très complet et aidant guide du parent protecteur réalisé par Face à l’Inceste (téléchargeable sur le site pour les adhérents) :

https://facealinceste.fr/upload/media/documents/0001/03/guide-parent-protecteur-2021-60c7099631a65.pdf

Recueil de témoignages

-La CIIVISE : Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants. Témoignages possibles aux 0 825 802 804 depuis la métropole et 0 800 100 811 depuis l’outre-mer et l’étranger ou par mail temoignages@ciivise.fr ou par courrier à CIIVISE, 14 av Duquesne, 75007 Paris


Brochure écrite par Fleur Delaunay, éditée par « Protéger l’enfant » et « sous le regard d’Hestia »

Merci à Caroline Bréhat pour son regard professionnel de psychothérapeute et son aide précieuse.

Avec le soutien de

Caroline BREHAT, psychothérapeute et psychanalyste

Le collectif pour l’enfance

CDP-Enfance

La dérive 371-4


(i) Conclusions intermédiaires de la CIIVISE de mars 2022 p.4 : https://www.ciivise.fr/wp-content/uploads/2022/03/CCl-inter_2803_compressed.pdf

(ii) https://www.memoiretraumatique.org/campagnes-et-colloques/2019-enquete-ipsos-2-violences-sexuelles-de-lenfance.html

(iii) https://facealinceste.fr/blog/dossiers/le-nouveau-chiffre-de-l-inceste-en-france

(iv) https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2018_Etat_des_lieux_des_mineurs_victimes_de_violences_sexuelles.pdf, p.7

(v) http://www.justice.gouv.fr/art_pix/stat_infostat_160.pdf

(vi)   https://www.ifemdr.fr/deceler-les-violences-sexuelles-faites-aux-enfants/

(vii) https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2012-05/reco2clics_reperage_et_signalement_inceste_par_les_medecins.pdf

(viii) https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2013-03/08r13_form_maltraitance_sexuelles_fiche_signalement.pdf

(ix) http://www.maltraitancesexuelleinfantile.be/index.php?id=478

https://www.ifemdr.fr/deceler-les-violences-sexuelles-faites-aux-enfants/

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2012-05/reco2clics_reperage_et_signalement_inceste_par_les_medecins.pdf

Murielle Salmona dans le Podcast Ou peut-être une nuit 5/6 de Charlotte Pudlowski

(x) Formation les bases de la connaissance en matière de violences sexuelles de l’association SVS

(xi) Livre l’inceste de Isabelle Aubry et  Gerard Lopez p.77

(xii) Livre l’inceste de Isabelle Aubry et  Gerard Lopez p.101

(xiii) https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2018_Etat_des_lieux_des_mineurs_victimes_de_violences_sexuelles.pdf

(xiv) Murielle Salmona dans le Podcast Ou peut-être une nuit 5/6 de Charlotte Pudlowski

(xv) Livre l’inceste de Isabelle Aubry et  Gerard Lopez P127-131

(xvi) Livre l’inceste de Isabelle Aubry et  Gerard Lopez p.60

(xvii) Livre l’inceste de Isabelle Aubry et  Gerard Lopez p.118 à 125

(xviii) https://carnets2psycho.net/dico/sens-de-clivage.html

(xix) Livre L’inceste de Isabelle Aubry et Gérard Lopez, p.86 à 94

(xx) Podcast Ou peut-être une nuit 5/6 de Charlotte Pudlowski

(xxi) Livre L’inceste de Isabelle Aubry et Gérard Lopez, p.163 à 170

(xxii) Conclusions intermédiaires de la CIIVISE de mars 2022, p.59

(xxiii) Livre Défendre les enfants d’Edouard Durand, p.75

(xxiv) http://www.psychomedia.qc.ca/lexique/definition/therapie-cognitivo-comportementale

(xxv) La résilience, Un regard qui fait vivre de Michel Manciaux dans Etudes 2001/10 (Tome395), p.321 à 330

https://www.cairn.info/revue-etudes-2001-10-page-321.htmretournoten05#no1

(xxvi) https://orbi.uliege.be/bitstream/2268/28564/1/La%20r%C3%A9siliene%20hors%20la%20loi.pdf publié par la Fondation pour l’enfance en 2000

(xxvii) Rencontre de la CIIVISE Paris, palais de la femme février 2022

(xxviii) Conclusions intermédiaires de la CIIVISE, mars 2022, p.43

(xxix) maltraitancesexuelleinfantille.be

(xxx) http://www.odpe.finistere.fr/content/download/107319/854901/file/FLYER-CALIOPPE-OK.pdf

(xxxi) Livre Défendre les enfants d’Edouard Durand, p.97

(xxxii) https://sousleregarddhestia.com/syndrome-dalienation-parentale-sap/

(xxxiii) Enquête Ipsos, 2015 : https://www.ipsos.com/sites/default/files/files-fr-fr/doc_associe/rapport-enquete_ipsos-amtv.pdf  note 13 p.13

(xxxiv) https://fr.wikipedia.org/wiki/Richard_Gardner

(xxxv) https://sousleregarddhestia.com/syndrome-dalienation-parentale-sap/

(xxxvi) https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/wp-content/uploads/2016/11/5e-plan-de-lutte-contre-toutes-les-violences-faites-aux-femmes.pdf

(xxxvii) http://www.lenfantdabord.org/wp-content/uploads/2011/06/SAP-CRISES-AU-TRIBUNAL-DE-LA-FAMILLE-SILBERG-2013.pdf

(xxxviii) Livre Défendre les enfants d’Edouard Durand, p.71

(xxxix) L’Obs 24/11/2017

(xl) Livre Défendre les enfants d’Edouard Durand, p.98

(xli) Faller 1998

(xlii) Phyllis Chesler (2013)

(xliii) Conclusions Intermédiaires de la CIIVISE de mars 2022, p.24

(xliv) Livre L’inceste de Isabelle Aubry et Gérard Lopez, p.135 à 142

(xlv) Livre L’inceste de Isabelle Aubry et Gérard Lopez, p.141 à 142

(xlvi) Livre Le berceau des dominations de Dorothée Dussy p.355

(xlvii) Livre Le berceau des dominations de Dorothée Dussy p.190

(xlviii) Conclusions Intermédiaires de la CIIVISE de mars 2022, p.43

(xlix) https://www.protegerlenfant.fr/contact/

(l) https://sousleregarddhestia.com/2021/05/13/se-renseigner/


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Pourquoi les Centres médiatisés ne sont pas des espaces protecteurs

La problématique des centres médiatisés, dans un cadre de violences intrafamiliales est méconnue. Pourtant il faut la comprendre pour protéger les victimes.

La problématique des centres médiatisés, dans un cadre de violences intrafamiliales est méconnue. Pourtant il faut la comprendre pour protéger les victimes.

Qu’est-ce que les centres médiatisés ?

Dans un cadre de relations familiales conflictuelles, les centres médiatisés sont des lieux de rencontres instaurés par la justice où tous les membres d’une famille peuvent se retrouver de manière encadrée. (On les confond avec les lieux neutres mais ce sont 2 procédures différentes). Les objectifs des centres sont de développer les actions de prévention, soutenir la coparentalité, renforcer les coopérations entre les différents acteurs et limiter leurs impacts sur les liens parents-enfants.

Sauf que si ces rencontres sont probablement bénéfiques dans le cadre de conflits simples, elles deviennent très problématiques dans un contexte de violences conjugales. Quand on force des enfants qui dénoncent des faits de violences à revoir régulièrement le parent accusé ou condamné, la justice ne fait que rajouter de la violence dans leur vie.

La problématique des centres médiatisés en cas de violences intrafamiliales

Pourquoi imposer à des enfants qui dénoncent un parent violent (parfois reconnu coupable et condamné) de le revoir ? L’argument de maintenir à tout prix le lien parent-enfant n’est plus recevable quand l’adulte est malveillant. Un parent maltraitant n’est pas un bon parent. Le revoir, c’est perpétuer la torture. Comment peuvent-elles guérir de leurs traumatismes si on oblige les victimes à revoir leur bourreau tous les mois ?

Le droit de l’enfant doit absolument primer sur le droit à l’enfant. Or actuellement, pour les juges français, le droit du parent accusé prime tandis que le témoignage des parents protecteurs est systématiquement remis en question. Il est grand temps de privilégier le principe de précaution à la présomption d’innocence, qui permet au parent violent de perpétrer son emprise. Cela fait donc partie de la problématique des centres médiatisés.

Quelle neutralité ?

Quand il s’agit de protéger les enfants victimes de violence psychologiques, sexuelles, etc, la neutralité n’existe pas. La justice ne doit pas maintenir des liens néfastes mais prendre partie pour les victimes et les éloigner à tout prix de leurs bourreaux. Les centres médiatisés ne sont pas des espaces protecteurs actuellement, ils ne font qu’alimenter des traumatismes.

Pire. De par leur mission, ils doivent signaler à la justice les incidents et transmettre une note de fin de mesure. Sauf que le jeu est faussé. Le personnel est rarement formé et se laisse facilement influencer par les parents violents, habitués à faire illusion. Notre association ne compte plus le nombre de rapports remis à la justice inexacts et ne reflétant pas la réalité des victimes. Ce n’est pas cela veiller à la sécurité des enfants et du parent protecteur.

La problématique des centres médiatisés est que cette neutralité affichée incongrue aboutit à de la complicité. Si les intervenants étaient plus présents et formés, ils entendraient les dénigrements, les interrogatoires, les critiques systématiques sur l’autre parent.

Le parent dysfonctionnel l’a bien compris. Si le centre médiatisé ne fait pas de rapport au juge, alors c’est la preuve que tout se passe bien. Et cela amène le juge à lui accorder un droit de visite où la violence pourra se reproduire à nouveau. Les enfants perdent confiance dans les intervenants, ils les sentent alliés de leur bourreau. Ils ne se confient plus. Et ils ne sont pas protégés.

Lutter contre les silences est capital. Il faudrait travailler étroitement avec le parent qui a dénoncé les violences et mieux prendre en compte la parole des enfants, même ceux sous emprise. Et si la parole advient, venir en aide, pour ne pas être complice.

Propositions d’amélioration :

On l’a vu la problématique des centres médiatisés englobe de nombreux domaines. Voici quelques points essentiels à améliorer.

Aucun droit de visite en centre médiatisé pour les parents violents. Les juges doivent prendre en compte tout incident connu de violence et donner la priorité à la sécurité des victimes. Au moindre soupçon, les visites sont stoppées.

Faire des centres médiatisés un lieu de bienveillance pour les victimes. Un lieu sans menace, pour stopper le cycle des violences. Ne pas laisser seuls les enfants avec les parents.

Mieux former les éducateurs sur les mécanismes d’emprise, de manipulation, sur le contrôle coercitif mais également sur les psycho-traumatismes et la variété des comportements possibles chez les victimes. Parfois il suffit d’un regard d’un parent pour réduire au silence un enfant.

Améliorer la circulation des infos vitales. Les centres médiatisés doivent être notifiés des poursuites pour violences et y porter une attention particulière. Inversement, ils doivent remonter les attitudes toxiques des adultes, les craintes des enfants et leurs refus d’interactions avec le parent accusé. Mettre à disposition du juge les vidéos des rencontres au besoin.

Respecter la volonté de l’enfant. Si ce dernier refuse de voir un de ses parents, ne pas accuser l’autre adulte de manipulation. Trop souvent, un enfant qui a envie de voir un de ses parents = bon signe relationnel, alors qu’un refus = enfant manipulé… Soutenons la parole des mineurs, redonnons-lui sa valeur. C’est hyper important dans cette problématique des centres médiatisés mais c’est valable partout !

Lutter contre la loi du silence. Souvent, au nom de la neutralité, la notion de violence n’est pas abordée, renforçant les mécanismes du déni, de la loi du silence et la souffrance.

Interdire l’accusation d’aliénation parentale. La théorie du SAP ne permet pas de protéger la mère et ses enfants contre la violence car son vrai objectif est de permettre à l’agresseur de maintenir le contact avec ses victimes, mère et enfants. Tout espace rencontre qui n’est pas clair sur cette réalité ne peut pas continuer à exercer son activité.

S’alerter des critiques systématiques du parent accusé envers le parent protecteur. Il faut s’interroger si il ne cesse de se victimiser ou de parler avec les intervenants au lieu de se concentrer sur les moments avec les enfants.

Obliger l’embauche d’un psy formé aux violences intrafamiliales et aux abus sexuels sur les enfants. Ses rapports doivent rendre compte de l’état psychique de l’enfant, de celui de ses parents, sans déformations, interprétation ou omission d’informations essentielles.

Respecter la décision des juges. Si ils n’écrivent pas que les sorties en extérieur sont autorisées, cela vaut pour les centres médiatisés. Les enfants restent sous surveillance. Les intervenants n’ont pas à s’allier au parent violent pour convaincre les enfants de suivre les demandes de celui-ci.

Sortir de l’illusion de la repentance sans long suivi psychologique avéré : un parent violent ne va pas frapper ses enfants dans un centre médiatisé, cela va de soi. Le centre n’apporte donc aucune garantie.

– En parallèle à une réforme en profondeur pour que les centres médiatisés deviennent ENFIN des endroits protecteurs, il faut interdire les Lieux neutres où les rencontres décidées par le JAF se font sans surveillance !!!

Les centres médiatisés savent peut-être régler des conflits mais ne sont pas adaptés en cas de violences intrafamiliales. Car la problématique est différente : les victimes ne recherchent pas la construction d’une coparentalité mais la protection. Pour trop d’intervenants, les violences sont du passé et il faut construire la suite. Or l’avenir n’est pas le « vivre ensemble » mais bien le soin des victimes.

Ce soin ne pourra advenir que par la conscience et la reconnaissance des violences à l’œuvre par tous (centre médiatisé inclus). Un problème non nommé ne peut jamais être traité. Les violences intrafamiliales, inceste inclus, ne s’arrêtent pas avec la fin du couple, elles continuent de s’exercer dans le lien forcé maintenu par la justice. Il faut en finir avec la neutralité et s’engager contre, requestionner les postures idéologiques sur la parentalité dans l’intérêt des enfants et de la société entière.

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La problématique des centres médiatisés, dans un cadre de violences intrafamiliales est méconnue. Pourtant il faut la comprendre pour protéger les victimes.

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Lettre de Anne, ancienne enfant victime d’inceste, lue durant la réunion de la CIIVISE le 16 mai 2022

Lettre de Anne, ancienne enfant victime d’inceste

Chers membres de la Ciivise, cher auditoire,

J’ai assisté à la réunion parisienne de février, sans prendre la parole. Je suis restée profondément bouleversée de découvrir qu’encore aujourd’hui, les enfants victimes d’inceste ne sont pas protégés. Les mères seront nombreuses dans cette assemblée.

J’ai, depuis le début de l’année lu tous les ouvrages traitant d’inceste,

de Dorothée Dussy à Levi Strauss, en passant par Bruno Clavier, Muriel Salmona, Françoise Héritier… J’ai regardé et lu tous les documentaires, à ce sujet. J’ai écouté et réécouté l’ensemble des podcasts pour comprendre, analyser. Les sujets d’actualité : PPDA, Sarah Abitbol, le rapport Sauvadet… J’ai tout écouté, analysé… pour essayer de comprendre ma propre histoire.

Tout s’est passé en plusieurs étapes pour moi, de l’amnésie traumatique, en passant par l’angoisse, les difficultés relationnelles. Tout s’est accéléré en 2018. Je serai brève. J’ai été victime, avec ma sœur jumelle d’inceste et plusieurs hommes de ma famille en sont les auteurs, principalement mon père. Ensuite, un frère, un oncle, un cousin de mon père.

J’ai découvert les ateliers d’escrime thérapeutique conduit par l’association « Stop aux violences sexuelles » en septembre 2021.

Cet été là, j’apprenais que ma nièce, la fille de mon frère, âgée de 4 ans, avait été victime d’agressions sexuelles de la part des 3 garçons qui sont accompagnés par mon frère et ma belle-sœur dans le cadre de leur agrément obtenu pour être famille d’accueil. L’été dernier je l’ai regardé et puis dans ma tête, je me suis dit « ça y’est c’est ton tour ». Et puis non, j’ai voulu que cela cesse.

Quelques coups de sabre ont changé ma vie. J’ai parlé début avril 2022 à ma famille, j’ai écrit une longue lettre qui leur est adressée, j’ai contacté votre commission et j’ai pu m’entretenir avec elle. J’ai parlé à chacun d’entre d’eux en relatant les faits.

Et puis ? Après cette parole, pas grand-chose, ma famille nie et/ou relativise, entretient un certain chantage affectif. Mon père s’est comporté comme un salopard, il faut et il faudra bien le dire, sous-entendant que l’inceste aurait eu lieu entre ma sœur et moi. Il a sous-entendu cela, ce week-end après plusieurs semaines de silence.

Ajouter de la confusion à l’agression, en permanence, il a menacé de se suicider pour me faire taire. 3 jours plus tard il m’a dit qu’il avait dit ça comme ça. J’ai demandé à ma mère s’ils avaient toujours envie de se suicider. Finalement, non.

Il me faut encore supporter cela. Ma colère est immense. La libération de la parole, la résilience sont des grandes arnaques à mon sens. Une parole qui se libère et qui retombe comme un caillou que l’on fait ricocher sur la surface plane d’une eau limpide et qui tombe à l’eau. C’est un désastre. Cela me donne l’image d’un charnier. Un charnier avec des victimes vivantes qui se débattent avec leurs paroles et en surplomb, les agresseurs, la société, la justice et l’État qui nous regardent nous débattre, nos paroles se mêlent et puis rien.

J’ai lu vos conclusions intermédiaires et c’est insuffisant. Depuis que j’ai parlé je m’interroge sur tout ce qui m’entoure.

Pourquoi voler une banane dans un commerce fait courir plus de risque judiciaire à un citoyen qu’une fellation imposée par un adulte à un enfant ?

Pourquoi est-on si facilement puni lorsqu’on resquille dans le métro et pourquoi est-il si facile d’allumer internet, de lancer YouPorn et d’y voir allègrement des images de violences sexuelles, qui prônent la domination, la culture du viol et la pédocriminalité ?

D’où nous viennent toutes ces images qui circulent en masse alimentant une certaine excitation. Mais de quoi s’agit-il réellement ?

J’ai parlé de confusion. C’est bien cela, ce qui me met en colère dans l’inaction de notre gouvernement et de la justice. Ajouter de la confusion au traumatisme dans une société qui ne légifère pas, qui ne punit pas, ne soigne pas, c’est accroitre le traumatisme !

Donc, je suis en colère. J’ai commencé à réfléchir à ce que contenait cette confusion, au-delà du seul fait de me « transformer » en victime. Cette confusion de mon enfance est celle qui perdure aujourd’hui alors que la parole des victimes et des femmes se libèrent.

Cette confusion rend encore possible aujourd’hui le fait qu’un enfant reste en contact avec son agresseur, cette confusion rend possible les féminicides, cette confusion rend possible de nommer, à des hautes fonctions d’État, des hommes contre lesquels il y a eu des accusations de violences sexuelles. Cette confusion permet que PPDA puisse porter plainte contre 16 femmes.

Cette confusion relève de notre responsabilité collective.

Cette confusion permet le déni de ma parole, de notre parole, maltraite les victimes. Nous épuise jusqu’au sang. Que se passera-t-il après vos conclusions si cette confusion est permise ?

J’ai peiné à terminer sur une note positive. L’idée de résilience elle aussi m’est devenue insupportable. Il est hors de question de soutenir une société dans laquelle serait reliée, par la confusion, la fabrique des victimes résilientes, les auteurs des agressions et les indifférents.

En revanche, les mots, les paroles comptent, et la lumière je la vois non plus dans la libération de la parole mais dans l’invention d’un autre monde, d’autres récits. La justice je l’attends désespérément. J’ai demandé à ma mère que je ne voulais pas de son héritage mais un dédommagement financier.

Depuis que j’ai parlé je me réjouis de lire et d’entendre des paroles alternatives. Cher Juge Edouard Durand je vous remercie pour votre parole lumineuse. Sur cette question que vous posé et que j’ai posé à ma famille sur le seuil de violence que nous tolérons dans notre société. J’ai fixé ma limite.

Anne C.