Espaces médiatisés : quand les mères protectrices sont injustement jugées

Espaces médiatisés : quand les mères protectrices sont injustement jugées

Les mères protectrices : coupables idéales

Les espaces médiatisés, censés garantir un environnement sécurisé pour les enfants victimes de violences intrafamiliales, ont un regard profondément biaisé sur les mères protectrices. Ces lieux, souvent dépourvus de formations spécifiques sur les violences conjugales, perpétuent des stéréotypes et des préjugés, tout en minimisant les traumatismes subis par les enfants et leurs mères.

Quand un enfant refuse de voir son père violent, la responsabilité est systématiquement reportée sur les mères protectrices.

Elle est accusée :

❌ D’être trop angoissée ou méfiante.

❌ De manipuler son enfant contre le père.

❌ De saboter la relation père-enfant.

On reproche souvent aux femmes victimes de violences de ne pas être parties plus tôt, surtout en présence d’enfants. Cette accusation témoigne d’une méconnaissance du contrôle coercitif. Le plus souvent, si elles ne sont pas parties plus tôt, c’est parce qu’elles ont donné, plusieurs fois, une chance à cet homme redevenu charmant (la lune de miel). C’est un processus connu de l’emprise et du cycle des violences. Il faut cesser de reprocher aux victimes d’avoir espéré que leur agresseur pouvait changer. Cesser de les rendre responsables.

La personne a dit « oui » à un moment donné à une relation de couple harmonieuse et amoureuse, elle n’a pas dit « oui » à une relation qui met son intégrité, sa sécurité, son bien-être et sa santé en péril.

L’agresseur est le seul responsable de ses actes. L’auteur des violences EST le coupable.

Une étude* confirme que les perceptions des agresseurs influencent les intervenants eux-mêmes jusqu’à construire un biais accusatif contre les mères protectrices bien ancré.

« Les commentaires dépréciatifs à propos des femmes victimes s’avèrent fréquents. […] Le spectre va de doutes sur la parole de la victime à des raisonnements structurés autour de sa co-responsabilité. »

* Guide du parent protecteur de l’association face à l’inceste

👉 Même lorsque des pères ont été condamnés pour violences, ils ne sont pas perçus comme violents pour les intervenants y compris quand les enfants alertent et témoignent de leur mal-être. Les intervenants cherchent alors des solutions pour faire changer d’avis l’enfant sans investiguer davantage sur les causes profondes de ce refus qu’ils imputent à la mère. En effet, comment un père qui se montre « charmant » avec eux pourrait être violent avec son enfant ?

Un soutien aveugle aux pères violents

Dans ces espaces, les pères violents savent manipuler leur image. Ils se présentent comme des parents modèles, apportent des cadeaux aux intervenants, plaisantent, et jouent les pères attentionnés.

➡️ Les mères, elles,  sont accusées de surprotéger ou d’aliéner l’enfant, renforçant un climat de culpabilisation systématique.

👉 Les enfants sont souvent ignorés, même lorsqu’ils expriment leur mal-être ou leur peur.

« Tant d’enfants sacrifiés sur l’autel du maintien du lien à tout prix, même quand ce lien est violent. Je passe mon temps à déconstruire l’idée absurde du mari violent qui peut être un bon père« 

Marion PIERRE, pédiatre à Rennes

Les intervenants des espaces rencontre restent dans une logique de soutien à la parentalité du père violent et autorisent toujours très rapidement d’élargir le droit de visite. Les mères protectrices doivent alors composer avec ces intervenants peu formés aux spécificités des violences conjugales.

Un témoignage rapporté dans le guide du parent protecteur illustre cet aveuglement :

« Une travailleuse sociale m’a dit : ‘Ne vous inquiétez pas, on est formés. Si l’enfant ment, je m’en rendrai compte.’ Quand je lui ai demandé quelle formation en psychologie elle avait, elle s’est fâchée. »

👉 Ce manque de compétences contribue à un sentiment d’épuisement pour les mères protectrices et leurs enfants, piégés dans un système qui ne les comprend pas.

“C’est du passé”, un discours dangereux

Lorsqu’une mère signale les violences passées et leurs répercussions sur son enfant, la réponse des intervenants est souvent la même : « C’est du passé, il faut tourner la page. »

Les violences qualifiées de « passé » ne le sont jamais vraiment. Pourquoi ?

1️⃣  Le contact parental se poursuit.

Même après une condamnation ou une interdiction d’entrer en contact, les mères protectrices doivent transmettre des informations sur la santé ou la scolarité des enfants ET gérer les stratégies du père pour multiplier les contacts et trouver des prétextes pour se plaindre au JAF.

⚠️ Ces exigences maintiennent un contrôle coercitif déguisé, rendant impossible pour les mères et les enfants de tourner la page.

2️⃣ Trop rare remise en question du comportement des hommes

Les pères profitent des espaces médiatisés pour jouer les victimes. Ils partagent leur « version des faits » avec des intervenants, qui finissent souvent par prendre leur parti.

👉 Les mères protectrices sont accusées de vouloir « se venger », tandis que l’état d’esprit rancunier des pères condamnés est rarement interrogé.

3️⃣ Des violences persistantes.

Même si les violences physiques appartiennent au passé, elles sont remplacées par des stratégies : plaintes, manipulations, ou pressions. Ces comportements visent à faire payer la séparation aux mères protectrices et à maintenir leur emprise.

👉 Les violences conjugales ne s’arrêtent PAS avec la séparation, elles changent de forme. Ignorer cette réalité, c’est condamner les mères et les enfants à une souffrance prolongée.

Comme en atteste le Dr Luis ALVAREZ, pédopsychiatre :

“Il n’y a pas de soin possible tant que la violence persiste. Le contrôle coercitif abîme les enfants : du fait de l’isolement, de la privation de la liberté, de la négligence des besoins vitaux, de violences sexuelles, de l’entrave aux relations entre l’enfant et son parent protecteur, de harcèlement et par la contrainte.

On ne peut PAS soigner ces enfants s’ils continuent à être exposés au trauma. Imaginez une personne qui a eu un accident de voiture et tous les quinze jours on lui impose un accident de voiture.”

Il faut donc cesser d’imposer aux enfants de revoir leur agresseur. Les espaces médiatisés devraient le savoir plus que n’importe qui.

Les espaces médiatisés, dans leur état actuel, échouent à protéger les victimes. Ils deviennent des lieux où les mères protectrices sont injustement jugées et où les pères violents bénéficient d’un soutien aveugle.

Et les JAF ont leur responsabilité, car ils devraient plus souvent demander un arrêt du droit de visite. Insister au nom du lien avec l’agresseur, c’est torturer davantage les victimes.

➡️ Pour que ces espaces remplissent vraiment leur rôle, il est urgent de recentrer leur mission sur la sécurité des enfants, et sur la reconnaissance des mères protectrices comme alliées de leur survie.


Vous pouvez consulter nos autres articles sur les espaces médiatisés et les visites médiatisées et la problématique des mères protectrices :

Visites médiatisées et violences intrafamiliales : une fausse solution

Pourquoi les Centres médiatisés ne sont pas des espaces protecteurs

Témoignage d’une grand-mère en colère contre la Justice qui ne protège pas sa fille et ses petites filles (témoignage sur des visites médiatisées)

Le centre médiatisé, un lieu pas si neutre…

Ces articles soulignent la nécessité d’ouvrir un espace de réflexion et des débats concernant ce sujet des visites médiatisées, et notamment repenser l’utilité des visites médiatisées pour les cas de violences intra-familiales.

Visites médiatisées et violences intrafamiliales : une fausse solution

Visites médiatisées et violences intrafamiliales : une fausse solution

De plus en plus, les juges aux affaires familiales ordonnent des droits de visites médiatisées en centre médiatisé ou en espaces rencontre dans des contextes de violences intrafamiliales. Ces dispositifs, perçus comme des solutions miracles, sont censés permettre des rencontres sécurisées entre un parent violent et ses enfants.

⚠️ Mais dans les faits, ces espaces se transforment souvent en théâtre de manipulation, où les enfants sont livrés à leur agresseur sous couvert de « protection”.

Une solution perçue comme miraculeuse

Les espaces rencontre sont présentés comme une réponse idéale : 

✔️ Les parents ne se croisent pas. 

✔️ Les rencontres sont « encadrées ».

Mais dans la réalité : 

❌ Les intervenants sont rarement formés aux violences intra-familiales ni aux traumatismes. 

❌ Leur rôle se limite souvent à observer.

Parfois, ils ne sont même pas dans la même pièce, mais ils “savent” que tout s’est bien passé…

➡️ Résultat : les enfants ne sont pas protégés, et les agresseurs continuent d’exercer un contrôle coercitif, impunément.

Une vision biaisée de la protection

Ces espaces lors des visites médiatisées ne protègent pas les enfants des abus psychologiques et physiques. 

👉 La souffrance des enfants est souvent ignorée, sous prétexte que « tout se passe bien » s’ils reviennent physiquement indemnes. Personne ne les écoute, ne valide leur avis, personne ne les croit.

⚠️ On oublie que les blessures invisibles – stress, terreur, cauchemars – sont tout aussi graves. Toutes les victimes n’ont pas les mêmes façons d’exprimer leurs peurs.

« Imaginez une personne blessée que l’on force à revivre son accident chaque semaine. » Dr Luis Alvarez

L’impact traumatique des visites médiatisées

Quand les enfants alertent sur leur mal-être, leur parole est souvent minimisée ou interprétée comme un « caprice ». La justice les force à croiser leur agresseur, au nom d’un lien parental qui est pourtant toxique.

Les enfants développent des troubles : 

❌ Stress post-traumatique. 

❌ Troubles somatiques.

❌Cauchemars et insomnies. 

❌ Repli sur soi ou énurésie. 

⚠️ Forcer un enfant à maintenir un contact avec son agresseur renforce son traumatisme et normalise les violences qu’il subit. Le lien avec l’agresseur ne doit pas être supérieur au respect de l’enfant victime.

Une pression injuste sur les mères

Quand un enfant refuse de voir son père violent, c’est la mère protectrice qui est accusée. Elle est jugée responsable de transmettre ses peurs ou ses angoisses à son enfant. On ressort le faux syndrome d’aliénation parentale… Elle est accusée de saboter la relation père-enfant, mais ça ne pose pas de problème que le père critique la mère, même en présence de l’enfant…

⚠️ Cette logique déplace la responsabilité des violences du père vers la mère protectrice.

👉 Cela crée une double peine, qui pousse les mères à se taire pour éviter d’être injustement stigmatisées.

Les violences du passé : un sujet ignoré

Les violences conjugales vécues sont souvent minimisées. Lors des visites médiatisées, les mères qui les invoquent ou signalent les effets négatifs des rencontres sont balayées d’un revers de main. 

Les intervenants disent : 

❌ « C’est du passé. » 

❌ « Les enfants doivent s’exprimer eux-mêmes. »  (mais on ne les croira pas…)

👉 Beaucoup d’enfants n’osent plus parler, sachant que leur parole ne sera ni entendue ni crue. Les intervenants ne comprennent pas le principe de sur-adaptation (un sourire ne fait pas l’enfant épanoui, faut creuser…). Les victimes se sentent seules et impuissantes face à ces simulacres de protection.

Un soutien incompréhensible au parent agresseur

Dans ces espaces : 

🎭 Les pères violents jouent les « parents modèles », manipulant les intervenants avec des cadeaux ou des compliments. 

Hors de la vue des intervenants, ils : 

❌ interrogent les enfants sur leur mère. 

❌ les menacent ou les culpabilisent. 

👉 Les intervenants, sensibles à l’image « charmante » des agresseurs (qui vont jusqu’à apporter des bonbons, des gâteaux), mettent toute leur énergie à « réparer » la relation père-enfant et ignorent les signaux de détresse des enfants.

➡️ Une logique destructrice pour les victimes.

L’urgence de changer la loi

Le rapport Alsalem (Rapporteuse spéciale, Nations unies, 2023) souligne : 

📜 « Les enfants exposés à la violence doivent être protégés, pas forcés à maintenir un lien avec leur agresseur. » 

👉 Pourtant, la loi actuelle privilégie encore et toujours le droit du père sur l’intérêt supérieur de l’enfant. 

➡️ Les droits de visite sont élargis, même en cas de violences avérées, ignorant le traumatisme des enfants ou le principe de précaution. 

⚠️ Il est urgent de repenser nos lois pour mettre la protection des enfants au cœur des décisions judiciaires.

Chaque enfant a droit à une enfance sans violence.

📢 Nous devons agir pour :

✔️ Réformer les espaces rencontre.

✔️ Imposer une vraie formation sur les violences aux intervenants, notamment ceux qui interviennent lors des visites médiatisées

✔️ Donner la priorité à la protection des enfants dans toutes les décisions judiciaires.

➡️ Partagez pour sensibiliser : les victimes méritent mieux que ce vide cruel de la protection de l’enfance.


Vous pouvez consulter nos autres articles sur les espaces médiatisés et les visites médiatisées :

Pourquoi les Centres médiatisés ne sont pas des espaces protecteurs

Témoignage d’une grand-mère en colère contre la Justice qui ne protège pas sa fille et ses petites filles (témoignage sur des visites médiatisées)

Le centre médiatisé, un lieu pas si neutre…

Ces articles soulignent la nécessité d’ouvrir un espace de réflexion et des débats concernant ce sujet des visites médiatisées, et notamment repenser l’utilité des visites médiatisées pour les cas de violences intra-familiales.

Ils l’ont torturée. Elle a survécu. Aujourd’hui, Joy témoigne.

Ils l’ont torturée. Elle a survécu. Aujourd’hui, Joy témoigne.

La naissance de Joy est marquée par le rejet.

Elle arrive “en remplacement” d’un frère mort à la naissance. Ses parents ne la désirent pas et ils le lui font comprendre dès son arrivée.

Au sein de cette famille aisée, Joy subit quotidiennement de la maltraitance physique et psychologique. Les coups pleuvent pour un rien, elle dort sur une couverture à la cave, on lui dit qu’elle vaut “moins qu’un chien”. Elle est considérée comme un poids par ceux qui devraient la protéger et l’aimer.

Très jeune, elle est placée en pouponnière. À 6 mois, elle est hospitalisée après avoir été battue, mais ses parents étouffent l’affaire, grâce à leurs relations.

Pourtant, la famille est déjà suivie par les services sociaux. Joy n’a jamais su pourquoi. Sa mémoire est un douloureux gruyère et chaque tentative de spéléologie dans son passé fait refluer des torrents d’angoisses et d’atrocités.

A partir de ses 5 ans, son père commence à la violer quotidiennement.

Puis l’horreur s’intensifie.

Ses parents ne mettent pas beaucoup de temps à trouver un moyen de gagner de l’argent en la prostituant.

Des “clients” viennent régulièrement violer cette petite fille. Ses parents sont présents, filment, participent. Ces violences inouïes sont banalisées au sein du foyer.

Une petite sœur arrive, une enfant qui est inversement choyée. Tout ce que Joy n’a pas, sa sœur y a droit. Ne serait-ce qu’un lit… Rapidement, l’enfant s’autorise à avoir le même comportement violent que ses parents sur Joy. Elle la frappe, la maltraite, lui crie dessus.

Un jour, les voisins alertent la police car ils entendent une enfant hurler. Ils découvrent ainsi l’existence de Joy qu’ils ignoraient totalement.

Joy est placée plusieurs fois en foyer et en famille d’accueil, ce qui signifie que sa détresse a dû alerter des adultes. Pourtant ses parents parviennent systématiquement à la récupérer.

Et quand elle revient à la “maison”, elle est à nouveau privée de nourriture, battue, violée et enfermée… L’enfer sur terre.

En sixième, une professeure repère son comportement mutique anormal et l’emmène voir les services sociaux. Dans la même journée, un juge des enfants ordonne un placement d’urgence, car la situation apparait enfin extrêmement préoccupante.

Malgré cela, ses parents trouvent toujours un moyen pour la récupérer par la force. Ils l’attendent devant son collège ou la reprennent lors des droits de visite. Pour la protéger, Joy est transférée de foyer en foyer (elle a compté, elle a connu plus de 60 placements) afin de l’éloigner de ses géniteurs.

Joy n’arrive pas à se confier. Elle ne fait confiance à personne et garde tous ses douloureux secrets, persuadée que la gentillesse cache toujours une menace. Une chouette éducatrice comprend que la parole est compliquée, alors elle lui offre un carnet pour qu’elle puisse écrire et exprimer son ressenti. Ça fonctionne et Joy peut enfin laisser sortir le trop plein.

Mais il n’y a pas de magie, les traumatismes sont tellement importants qu’à 15 ans, Joy doit être hospitalisée. Elle est épuisée, comme vidée de toute énergie vitale.

L’idéal serait de rompre définitivement le contact avec ses géniteurs.

La Justice cherche à obtenir l’interdiction totale des droits de visite.

Hélas, à la veille de l’audience qui permettrait de statuer dans ce sens, sa mère et son amant orchestrent un dernier enlèvement, alors qu’elle est toujours à l’hôpital.

Pendant un mois et demi, Joy est déplacée constamment, violentée par sa mère et son amant. Sa génitrice la terrorise avec un couteau. Par miracle, Joy réussit à contacter une éducatrice, qui organise son sauvetage.

A nouveau hospitalisée en urgence, elle est ensuite placée dans un foyer ultra-sécurisé. Ce foyer signale officiellement l’affaire à la justice, déclenchant une enquête. La justice interdit enfin tout contact avec sa famille.

L’autorité parentale est retirée définitivement, et ses parents condamnés à de la prison.

Joy refuse d’assister aux procès, mais deux éducateurs la représentent. Après la condamnation, un éducateur la force à rendre visite à sa mère en prison, malgré le refus catégorique de Joy. Pendant cette confrontation, sa génitrice lui adresse cette phrase : « Tu vas crever avant moi. »

L’éducateur accepte enfin qu’elle coupe définitivement tout contact avec sa famille.

Après le procès de son père, elle entame un travail psychologique pour se reconstruire. Quand Joy devient mère pour la première fois, elle rencontre une infirmière qui deviendra la première personne à qui elle fait confiance, et son amie.

Joy rejette totalement la violence et élève ses enfants dans un cadre bienveillant. Ces derniers ne connaissent pas son passé, mais elle prévoit de leur en parler un jour.

Elle a écrit un livre sur son histoire, pour montrer que même après l’horreur, on peut s’en sortir.

Elle insiste sur l’importance de trouver une personne de confiance et d’accepter l’aide.

Je veux surtout montrer que malgré tout on peut s’en sortir, que rien n’est jamais perdue d’avance si on croise de bonnes personnes, patientes surtout et bienveillantes… Ne vous fermez pas complètement. Il existe des gens bien. Ouvrez-vous à eux.

JOY

Vous pouvez consulter d’autres témoignages ici.

Témoignage de Laura : « J’ai porté plainte, il a souri ». L’impunité des prédateurs en 2025

Témoignage de Laura « J’ai porté plainte, il a souri » L’impunité des prédateurs en 2025

Laura grandit dans un contexte familial pas toujours évident : un père alcoolique et instable, une mère qui travaille beaucoup pour maintenir la famille.

L’enfant trouve souvent un refuge chez les voisins où ses deux grands frères ont des copains. Là-bas, on mange ensemble à table, la vie de famille a l’air plus normale, plus facile.

Laura se lie avec Luc, l’aîné des enfants de cette famille, qui a 11 ans de plus qu’elle, et qui apparait comme un autre grand frère. Les années passent. Vers les 13 ans de la jeune fille, Luc a su instaurer un climat de confiance et de valorisation.

Il commence à lui demander des petits services (des massages, du repassage, des repas…). Sous couvert de « proximité fraternelle », il multiplie les contacts physiques.

Laura ne sait plus où sont les limites. Le processus d’emprise est bien en place. Les méthodes sont toujours les mêmes : Luc isole Laura, la convainc qu’il est là pour la protéger, qu’elle est spéciale, puis finit par lui imposer des gestes sexuels qui deviennent progressivement des agressions.

Chaque visite de l’ado devient une occasion pour la violer. Il lui impose des sodomies systématiques, justifiant cet acte par “respect” pour le fait qu’elle « restera vierge » pour son futur petit ami. Cela dure des années.

Quand son frère épouse la sœur de Luc, les familles se rapprochent davantage et il devient impossible pour Laura d’éviter les assauts de son agresseur.

Elle est incapable de se percevoir comme une victime.

Laura est persuadée qu’il l’apprécie et qu’elle doit répondre à ses attentes.

Elle pense que “l’intérêt” qu’il lui porte est une reconnaissance de ce qu’elle vaut. Pourtant, elle voit bien qu’il se comporte mal, qu’il trompe sa compagne régulièrement, il la dénigre, la manipule. Mais la jeune fille est totalement sous sa coupe, elle aussi.

Et même quand Laura commence à avoir des relations amoureuses avec des garçons de son âge, elle reste incapable de concevoir une sexualité consentie avec eux. Luc continue de la manipuler, lui imposant une priorisation. Laura rencontre finalement son premier petit ami sérieux et cherche à s’émanciper de l’influence de Luc.

Son frère divorce. Elle réalise que cette “belle-famille” n’est pas si idyllique que cela, voire toxique.

Luc voit qu’elle s’éloigne et tente de garder le contrôle sur elle, en entretenant une relation amicale avec son copain. Finalement, une dispute violente avec la famille de Luc provoque une rupture nette. Laura sort définitivement cette famille.

Deux ans plus tard, Laura se marie avec un homme bienveillant, qui devient un soutien fondamental dans sa vie. Elle fonde une famille heureuse, avec quatre enfants, se concentre sur sa carrière et enfouit totalement ce qu’elle a vécu, sans jamais le verbaliser.

Luc continue sa vie, a des enfants, se sépare, mais garde une influence indirecte sur Laura, notamment en manipulant ses neveux, (les enfants de la sœur et du frère).

Comme Laura est très proche de ses neveux, il peut l’atteindre facilement car ces jeunes garçons considèrent hélas leur oncle comme un modèle.

En 2023, une série d’événements déclenche un effondrement psychologique de la jeune femme :

  • L’anniversaire de ses filles, qui atteignent 13-14 ans, l’âge où tout a commencé pour elle.
  • La sortie du film « Le Consentement« , qui provoque un choc violent.

Laura est frappée par une prise de conscience brutale : ce qu’elle a vécu n’est pas normal.

Ce sont des viols sous emprise et non un “passage obligé” pour le “remercier” de son “intérêt” singulier, comme elle en essayait de se convaincre avant.

Elle sombre dans un état de stress post-traumatique : crises d’angoisse, sidérations, incapacité à travailler, peurs incontrôlées, pleurs incontrôlés.

Son médecin l’oriente vers une thérapeute, qui l’aide à comprendre l’ampleur de ce qu’elle a vécu.

Un jour, Laura confie son histoire à la compagne de son frère, qui la croit et l’encourage à parler à ses grands frères. Convaincue, Laura leur révèle alors son terrible secret.

Ces derniers sont sous le choc mais ne remettent aucunement sa parole en doute. Ils prennent conscience du piège dans lequel elle a été enfermée.

Ses frères, sa famille, ses amis, tous la soutiennent et tous s’accordent : il faut porter ces années d’agressions devant la Justice.

En janvier 2024, Laura dépose plainte pour viols. L’accueil est bon, la gendarme qui la reçoit est visiblement formée à l’écoute. L’audition dure cinq heures. On l’informe qu’une enquête est enclenchée, on lui confirme qu’elle est une victime.

Et puis… rien. Aucune avancée pendant plusieurs mois malgré les relances de Laura : “l’enquête est en attente”.

Pire, par un mauvais concours de circonstance, Laura découvre que son agresseur a accès à sa plainte… Depuis des mois, Luc a non seulement le temps de se préparer mais également de recevoir des soutiens puissants et influents. Laura décide d’alerter le maire de sa ville, qui intervient pour débloquer l’enquête en octobre 2024. Une nouvelle enquêtrice, d’une autre brigade, est nommée.

En décembre 2024, son mari, ses frères, sa belle-sœur, sa mère et même l’ex-femme de Luc (qui témoigne d’un schéma de manipulation similaire) sont auditionnés. Les choses bougent à nouveau.

Un mois plus tard, c’est l’hallucination. Laura apprend que la plainte est classée sans suite. Il n’y aura pas d’enquête approfondie, pas d’expertise psychologique, pas de confrontation.

RIEN.

Refusant d’accepter l’impunité, Laura a décidé de poursuivre son combat en se constituant partie civile.

Laura ne se bat plus seulement pour elle, mais pour toutes les victimes étouffées par un système qui protège les prédateurs.

Aujourd’hui, elle témoigne pour dénoncer l’emprise et pour alerter la société :

  • La manipulation et l’emprise s’installent insidieusement.
  • Les dysfonctionnements judiciaires vont de la lenteur des enquêtes aux classements sans suite.
  • Le silence des proches pèse : même des gens “bien” ne voient pas.
  • L’impact sur la vie est fou (santé mentale, travail, parentalité…)
  • On peut se reconstruire, on peut transmettre des valeurs fortes à ses enfants. Il y a de l’espoir.

Vous pouvez lire de nombreux autres témoignages de victimes dans notre rubrique « Articles et témoignages« .

Sept Conseils et astuces pour espérer être entendu face aux interlocuteurs socio-judiciaires

7 Conseils et astuces pour espérer être entendu face aux interlocuteurs socio-judiciaires

Pourquoi ces conseils ?

Les interlocuteurs socio-judiciaires (juges, experts, éducateurs) cherchent souvent à détecter des conflits, parfois au détriment de la compréhension de la situation réelle (de la violence et non du conflit). Or ils ont hélas un poids considérable sur les décisions de Justice. Les magistrats débordés se réfèrent parfois uniquement à leurs rapports. Voici donc quelques conseils pour gérer ces rendez-vous délicats sans qu’ils se retournent contre le parent protecteur.

🎯 Votre objectif : montrer que vous êtes responsable et crédible, sans alimenter les stéréotypes ou idées préconçues.

1. Privilégiez les faits, pas les émotions.

🛑 Pas de débats inutiles. Les faits parlent d’eux-mêmes : racontez une scène précise plutôt que de généraliser. Ne donnez pas matière à interprétation, soyez factuel, concis.

🛑 Évitez les jugements sur l’autre parent en utilisant des termes émotionnels forts comme « manipulateur ou « menteur », qui peuvent être perçus comme un biais.

Exemple :

❌ « Il est toujours irresponsable. »

✅ « Lors de l’anniversaire de notre enfant, il a oublié de venir le chercher. »

2. Adoptez une attitude calme et tempérée.

Pourquoi ? Une attitude posée vis à vis des interlocuteurs inspire confiance et crédibilité. Alors prenez votre temps pour gérer vos émotions (évitez de couper la parole, crier ou s’emporter), et la qualité de vos réponses.

🎤 Exemple : Si on vous pose une question surprenante, prenez une inspiration, buvez une gorgée d’eau, et reformulez :

❌ « Vous n’avez pas lu le dossier ?« 

✅ « Si je comprends bien, vous souhaitez savoir… ? »

Le non-verbal compte autant que vos mots. Restez ouvert(e), les bras détendus, avec un contact visuel respectueux.

3. Prenez le temps de réfléchir

Les interlocuteurs peuvent chercher à tester votre réaction ou feindre une empathie.

💡 Exemple de clarification :

« Qu’est-ce qui vous fait dire que… ? »

« Pourriez-vous préciser votre question ? »

Ne vous sentez pas obligé(e) de répondre immédiatement si la question vous déstabilise (surtout si elle vous déstabilise d’ailleurs). Vous pouvez prendre du temps pour réfléchir, trouver les mots justes et éviter les discours tranchés. L’objectif est de rassurer l’interlocuteur, montrer subtilement que vous ne correspondez pas au discours de l’agresseur, en le nuançant et, dans le meilleur des cas, en parvenant à le balayer.

4. Soyez courtois, même si c’est difficile.

Donner une impression de coopération aux interlocuteurs peut désamorcer les tensions :

« Merci pour votre observation, je vais réfléchir à votre point de vue. »

Appelez l’autre parent par son prénom, parler de « NOTRE enfant”…

S’il est question de parler des difficultés passées : « Je n’aurais pas abordé ce point spontanément, grâce à un travail thérapeutique, c’est du passé, mais pour répondre à votre question… »

🎯 Objectif : rester professionnel(le), même face à des remarques injustes ou biaisées. Ne coupez pas la parole et surtout évitez de paraître sur la défensive.

5. Structurez vos propos ET vos documents.

Apportez aux interlocuteurs des preuves tangibles ET simplifiées dans l’idée d’être vite compréhensible :

Une page ou deux pour résumer, un peu comme le ferait un CV.

📁 Gardez les documents officiels à portée de main mais ne les sortez que si on vous les demande

Une frise chronologique peut aider.

Exemple :

« Voici les comptes rendus des deux dernières années qui confirment ce que j’avance. »

Évitez les monologues et les digressions.

6. Adoptez une apparence soignée et sobre.

Pourquoi ? Dans nos sociétés, l’apparence influence hélas la première impression.

✅ Tenue recommandée : tenue sobre, simple et surtout, propre.

🛑 À éviter : maquillage vraiment trop prononcé, vêtements qui font trop négligés, vêtements troués. Trop de bijoux (certains sont parfois bruyants, ce qui peut parasiter l’entretien).

Astuce : Préparez votre tenue à l’avance pour éviter le stress.

7. Adoptez une attitude disponible et ouverte.

Disponibilité pour les rendez-vous : lorsqu’il y a trop de rendez-vous annulés avec les interlocuteurs socio-judiciaires, même pour de bonnes raisons, tels que travail ou rdv médical (et ils le sont souvent pour de bonnes raisons), cela n’est pas forcément bien compris par vos interlocuteurs.

N’hésitez pas à donner votre accord si les travailleurs sociaux souhaitent contacter le médecin traitant, le pédiatre, l’école, le psychologue,… Cela donne une image d’ouverture, et cela permet parfois que vos dires soient confirmés par des professionnels.

Tous ces conseils ne seront pas forcément pertinents pour vous, piochez et prenez ceux qui vous correspondent.

Votre calme et votre préparation peuvent tout changer.

Prenez soin de votre image, de vos mots, et restez centré(e) sur l’intérêt de votre enfant.


Cet article a été rédigé avec le concours d’une mère protectrice coachée par Ariane Fayon. https://www.arianefayon.fr/


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Qu’est-ce que “l’Entitlement“ et comment le repérer

Qu’est-ce que “l’Entitlement“ et comment le repérer

Qu’est-ce que “l’Entitlement“

Dans le sillage du procès de Dominique Pelicot, un débat a émergé concernant la nécessité d’une éducation renforcée au consentement. Nul ne remet en question cette urgence, il est évidemment important que les enfants grandissent en ayant conscience que le consentement est la base fondamentale des interactions respectueuses. Ils doivent apprendre que toute personne a le droit de fixer ses propres limites, de dire non, et que ces limites doivent être respectées par tous, sans exception.

Cependant, ce serait une erreur de considérer cette éducation comme une solution miracle.

Supposer que les violences sont dues à une incompréhension du consentement ou à une éducation défaillante est réducteur et erroné. Les hommes impliqués dans le procès de Mazan, par exemple, sont parfaitement conscients de leurs actions, ayant délibérément cherché sur le site internet ce type de viol.

  • Ce ne sont pas des naïfs mal informés sur la nature de leurs actes.
  • Ce ne sont pas des petits garçons mal éduqués.
  • Ce ne sont pas des hommes qui recherchaient le consentement.

Non. Ce sont des hommes qui ont TOUT fait pour violer en toute impunité.

Les agresseurs des victimes de violences intrafamiliales procèdent de la même manière. Ils savent et cherchent à ne pas se faire prendre.

Réduire la violence à une histoire de manque d’éducation, en plus d’infantiliser les hommes et favoriser l’impunité, c’est se contenter de gratter le sommet de l’iceberg.

Or, sous l’eau, il y a des dysfonctionnements immenses : les rapports de domination (inhérents au genre et à l’hétérosexualité), il y a le contrôle coercitif, les dynamiques de pouvoir…

Les Anglais ont un mot pour désigner cette notion de droit implicite ou explicite exercé par les dominants dans la société :

  » ENTITLEMENT « 

On peut traduire Entitlement en français par « sentiment de droit » ou « prétention ».

Ce mot décrit une attitude selon laquelle certains individus croient avoir des droits incontestés sur autrui ou mériter certains privilèges indépendamment de leurs actions ou mérites réels. Et ces croyances sont renforcées par la société.

En effet, les structures de pouvoir permettent souvent aux violences de se perpétrer non parce que les agresseurs ne comprennent pas le tort qu’ils infligent, mais parce qu’ils le font impunément. L’entitlement est une arme aussi silencieuse que puissante parce que justifiée par des normes culturelles, des dominations physiques, psychologiques, économiques…

Comment repérer l’entitlement ?

Les red flags :

  • Une personne qui impose systématiquement ses choix sans considérer les opinions ou les besoins des autres membres de la famille.
  • Utilisation de justifications telles que « c’est pour ton bien » ou « je sais ce qui est mieux pour toi » pour manipuler ou contrôler les autres.
  • Ignorer ou ridiculiser les limites personnelles établies par d’autres, qu’elles soient émotionnelles, physiques ou psychologiques.
  • Réponses extrêmes de colère ou de déception lorsque les choses ne se passent pas comme souhaité ou lorsque leur autorité est remise en question.

Nos souhaits :

  • Promouvoir une éducation qui met en avant l’égalité, le respect mutuel et l’importance de l’autonomie individuelle dès le plus jeune âge. Intégrer des programmes qui discutent des rôles de genre et des dynamiques de pouvoir au sein des familles.
  • Encourager une communication honnête et ouverte au sein de la famille, où chaque membre peut exprimer ses sentiments et ses opinions sans crainte de jugement ou de répercussion.
  • Inciter les victimes à chercher du soutien extérieur, que ce soit par le biais de thérapie ou de groupes de soutien, pour contrer les dynamiques de pouvoir déséquilibrées.

On a évidemment du mal à croire en l’arrivée prochaine d’une société où des comportements de ce type auront disparu. En attendant, plus on saura les reconnaitre, plus on pourra tenter de les démanteler.

Cela requiert un engagement collectif pour changer non seulement le regard et les comportements individuels mais aussi les normes culturelles et sociales qui perpétuent ces dynamiques de pouvoir toxiques.

La priorité reste encore de croire les victimes, pour ensuite commencer à changer la narrative et créer des familles et des communautés plus sûres pour tous.


Vous pouvez trouver d’autres ressources sur ce site, ainsi que des témoignages.

Mettre fin à l’inversion des responsabilités dans les violences intrafamiliales

Mettre fin à l’inversion des responsabilités dans les violences intrafamiliales

Qu’est-ce que l’inversion des responsabilités ?

Chaque fois qu’on aborde le sujet des violences intrafamiliales, on rencontre un phénomène tristement universel : la mise en accusation des victimes. Ce mécanisme repose sur deux ressorts puissants. D’une part, une volonté d’esquiver une vérité insupportable : il n’y a aucun moyen infaillible de se protéger de la violence dans le cercle familial. D’autre part, une soumission à un ordre établi, qui considère la violence comme un fait normalisé, intouchable.

Cette inversion des responsabilités est un héritage millénaire. Elle renforce l’idée que si une femme ou un enfant subit des violences dans son foyer, c’est qu’ils n’ont pas su prévenir, fuir ou réagir : « Pourquoi n’est-elle pas partie ? Pourquoi n’a-t-il pas parlé ? Était-ce si grave ? N’as-tu pas, d’une certaine manière, déclenché sa colère ? »

Ces questions, posées aux victimes, traduisent une logique qui dédouane systématiquement l’agresseur.

Ce dernier, on le sait pourtant, agit en pleine conscience, profitant de son pouvoir, de son impunité, de l’intimité du foyer et des mécanismes d’intimidation pour exercer son emprise.

La culpabilité des victimes est alimentée par un discours de résignation. On leur fait croire qu’elles auraient dû mieux prévoir, mieux réagir ou mieux fuir. Mais est-ce vraiment aux victimes de se contorsionner à l’infini pour éviter la violence ?

Pourquoi ne questionnons-nous pas les agresseurs ? Pourquoi n’imposons-nous pas à ceux qui nuisent un changement de comportement ?

Les violences intrafamiliales ne sont pas des accidents ; ce sont des actes délibérés de domination et de dévalorisation, perpétrés par des individus en position de force. C’est une guerre silencieuse menée dans l’espace supposé être celui de la sécurité.

Comme le dit Mona Chollet dans Résister à la culpabilisation (1), il est plus facile de supposer que la victime a « déconné » plutôt que d’accepter que personne n’est à l’abri. Accepter cette réalité serait trop dérangeant, car cela signifierait remettre en cause un ordre établi où l’agresseur, qu’il soit conjoint, parent ou proche, reste intouchable.

Inverser cette logique revient à bouleverser des siècles de domination : remettre en question le droit du plus fort, demander des comptes à celui qui choisit d’agresser plutôt que de scruter la conduite de sa victime. C’est une révolution nécessaire, mais épuisante, car elle défie des schémas profondément enracinés.

En 2025, l’espace familial, comme tout autre lieu, devrait être un endroit où chacun peut évoluer en sécurité et en sérénité. Il ne devrait pas être nécessaire de « se défendre » pour exister.

La honte et les interrogations doivent changer de camp : elles appartiennent aux agresseurs, et à eux seuls. Il faut Mettre fin à l’inversion des responsabilités dans les violences intrafamiliales.

Ensemble, construisons un monde où la sécurité et le respect deviennent la norme, y compris – et surtout – au sein des foyers.


(1) Résister à la culpabilisation
Sur quelques empêchements d’exister

Mona Chollet

Harcèlement, humiliations, insultes : nous sommes bien averti.es de ces fléaux de la vie en société et nous nous efforçons de lutter contre eux. Mais il y a un cas de figure que nous négligeons : celui où l’agresseur, c’est… nous-même. Bien souvent résonne dans notre tête une voix malveillante qui nous attaque, qui nous sermonne, qui nous rabaisse ; qui nous dit que, quoi que nous fassions, nous avons tort ; que nous ne méritons rien de bon, que nous présentons un défaut fondamental. Cette voix parle particulièrement fort quand nous appartenons à une catégorie dominée : femmes, enfants, minorités sexuelles ou raciales…
Ce livre se propose de braquer le projecteur, pour une fois, sur l’ennemi intérieur. Quels sont ces pouvoirs qui s’insinuent jusque dans l’intimité de nos consciences ? Comment se sont-ils forgés ?
Nous étudierons quelques-unes de leurs manifestations : la disqualification millénaire des femmes et, notamment, aujourd’hui, des victimes de violences sexuelles ; la diabolisation des enfants, qui persiste bien plus qu’on ne le croit ; la culpabilisation des mères, qui lui est symétrique ; le culte du travail, qui indexe notre valeur sur notre productivité ; et enfin la résurgence de logiques punitives jusque dans nos combats contre l’oppression et nos désirs de changer le monde.


Vous pouvez trouver d’autres ressources sur ce site, ainsi que des témoignages. Vous pouvez également visualiser les préconisation de la CIIVISE. Il faut appliquer le principe de précaution « je t’écoute, je te crois, je te protège ». Et bien connaitre les stratégies des agresseurs afin de pouvoir les contrer. Les politiques doivent placer les droits de l’enfant comme une politique publique prioritaire, il y a urgence, tant d’enfants sont en grande souffrance. Et il faut protéger leur parent protecteur, souvent victime également.

Violence Vicariante : ce qui se cache derrière cette notion très importante

Violence Vicariante : ce qui se cache derrière cette notion très importante

Qu’est-ce que la violence vicariante ? Peut-être avez-vous déjà vu passer le mot de « vicariant » ?

Peut-être avez-vous déjà vu passer le mot de « vicariant » ? Ce terme rare est utilisé pour décrire un phénomène où une personne expérimente indirectement quelque chose à travers une autre. Pour donner un exemple léger, si une personne vous raconte le dernier film qu’elle a vu, vous pouvez vivre l’histoire à travers elle. C’est ce qu’on appelle apprendre ou ressentir quelque chose de manière “vicariante”. Pas besoin de l’expérimenter par soi-même, on le vit via un tiers.

Le mot « vicariant » vient du latin « vicarius », qui signifie « substitut » ou « remplaçant ». Dans le domaine de la psychologie, l’apprentissage vicariant, popularisé par Albert Bandura, se réfère donc à l’apprentissage qui se produit en observant les conséquences des actions d’autrui.

Cette forme d’apprentissage est centrale dans la théorie sociale cognitive. Cependant, son application s’est étendue à des mécaniques humaines plus sombres et plus complexes. Récemment, le terme « vicariant » a été réapproprié dans le contexte des violences intrafamiliales pour décrire des situations où un membre de la famille, souvent un enfant, devient la cible de violences initialement dirigées vers un autre membre de la famille.

Par exemple, si un parent violent ne peut plus cibler son agressivité vers son partenaire à cause de l’absence ou de l’impossibilité de ce dernier à subir davantage de violence, l’enfant peut devenir le « remplaçant » involontaire, subissant ainsi la violence indirectement destinée à un autre.

Dans ce contexte, l’enfant est considéré comme une victime de violence vicariante.

C’est la même chose si l’agresseur s’en prend aux enfants pour augmenter la violence qu’il inflige à l’autre parent. Ils deviennent aussi des victimes de violence vicariante.

La différence entre une victime collatérale ou une “victime de violence vicariante”, c’est l’intention de nuire. La victime qui subit de la violence vicariante n’est pas la cible initiale, mais comme elle est étroitement liée à la situation, l’agresseur l’utilise pour nuire à la personne qu’il veut détruire.

La victime qui subit de la violence vicariante n’est pas la cible initiale, l’agresseur l’utilise pour nuire à la personne qu’il veut détruire.

La première a avoir associé le mécanisme à la violence est la psychologue espagnole Sonia Vaccaro :

«  En assassinant les fils et filles, l’agresseur s’assure que la femme ne s’en remettra jamais  » explique-t-elle. Toujours en avance dans la lutte contre les violences, l’Espagne a intégré cette notion de violence par substitution au Pacte d’État contre la violence de genre dès 2017.

Et quand en juin 2021, un tragique double infanticide a ébranlé ce pays, le concept de « violence vicariante » fut utilisé par le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez. Thomas venait d’assassiner ses deux filles, Olivia (6 ans) et sa sœur Anna (1 an), dans le but de torturer psychologiquement leur mère, Beatriz, suite à leur séparation.

Dans son discours, le premier ministre déclarait :

« La violence vicariante représente une forme de machisme particulièrement brutale et inhumaine, car elle inflige de la souffrance non seulement à la femme mais également à ses enfants. »

Pedro Sanchez exprimait également sa frustration face au déni persistant de la violence vicariante par certains, malgré les efforts de son gouvernement, des associations et des militantes féministes pour intégrer cette terminologie dans le langage courant.

On le déplore également, même si, vu de France, cette notion a au moins le mérite d’exister dans un pacte d’Etat. Il faudrait que les mécaniques de violences vicariantes soient mieux prises en compte partout.

Il nous semble important de populariser le terme « vicariant » dans le cadre de la sensibilisation aux violences intra-familiales.

  • Cela aide à mettre un mot sur un phénomène souvent invisible et mal compris, fournissant ainsi une base pour reconnaître et articuler les expériences des victimes indirectes.
  • Cela permet également de sensibiliser à la nécessité de protéger tous les membres de la famille, en soulignant que les dommages causés par la violence domestique peuvent s’étendre au-delà de la cible initiale.

Plus on saura identifier ce genre de mécanismes, plus, (on l’espère), on pourra développer des interventions ciblées et des supports adaptés à ceux qui ne sont pas seulement témoins, mais aussi victimes indirectes de cette violence.


Vous pouvez trouver d’autres ressources sur ce site, ainsi que des témoignages.

Marche blanche 12 octobre 2024 à la mairie de Maurepas (78) pour Ginger et Seydou

Marche blanche 12 octobre 2024 à la mairie de Maurepas (78) pour Ginger et Seydou

Sekina, la maman de Ginger et Seydou,
l’association Protéger l’Enfant,
la Fédération nationale des victimes de féminicides (FNVF)
organisent une Marche blanche
le 12 octobre 2024 à 14h à la mairie de Maurepas dans les Yvelines (78)

La marche blanche aura lieu en commémoration des 6 mois de l’assassinat des enfants Ginger et Seydou, tués par leur père le 12 avril dernier.

Tous celles et ceux qui pourront venir soutenir cette maman et nous aider pour le cortège seront les bienvenus. Venez habillés en blanc. La marche blanche se fera dans le calme et le recueillement. Rendez vous à 14h devant la mairie de Maurepas (78) :

1, place Charles de Gaulle,
78310 Maurepas

Merci

L’histoire horrible, si douloureuse, de Sekina résonne comme un douloureux rappel des violences intrafamiliales et de leurs conséquences les plus tragiques.

Sekina est une jeune femme qui a vu sa vulnérabilité exploitée par celui qui était sensé l’aimer et la respecter.

Elle avait rencontré son conjoint, Daouda, il y a 7 ans grâce aux réseaux sociaux, et était tombée rapidement amoureuse de cet homme. Hélas tout aussi rapidement, ce dernier a exercé des comportements dominateurs et violents.

Stratégiquement, il l’a isolée de sa famille et de ses proches. C’est un schéma classique, malheureusement, chez les individus abusifs qui cherchent à exercer un contrôle total sur leurs victimes, les coupant de toute forme de soutien extérieur.

Les rares fois où sa famille a pu observer Sekina avec son conjoint et leurs enfants, ils se sont étonnés des accès de colère de cet homme. Mais Sekina, sous son emprise, ne se plaignait pas et répétait qu’elle l’aimait. Extérieurement, on avait l’impression que son comportement coercitif s’étendait jusqu’au contrôle de son apparence : il lui interdisait de se parfumer ou de se maquiller pour aller travailler, la réduisant à un objet lui appartenant, sans autonomie ni liberté.

Hélas, le niveau de violence auquel Sekina était exposée est devenu tragiquement clair après la mort des enfants. Sa famille a pu observer les marques de torture sur son corps, notamment des blessures infligées avec le fil électrique d’un radiateur.

Un jour, Sekina a fini par trouver le courage et la force de porter plainte.

Ce jour-là, pendant que Sekina était au commissariat, Daouda a été récupérer les deux enfants à la crèche, les a tués à coups de couteau. Ginger avait 3 ans et Seydou 18 mois.

Depuis, la famille accompagne Sekina au mieux, réalisant dans la douleur les sévices endurés par la jeune femme pendant des années, jusqu’à cette issue tragique et dévastatrice.

L’horreur subie par Sekina et ses enfants doit nous pousser à lutter contre la violence domestique avec encore plus de vigueur, et à s’assurer que les ressources et le soutien soient accessibles à toutes les victimes, surtout les plus vulnérables.


Venez soutenir Sekina et sa famille. Rejoignez nous à la marche blanche du 12 octobre !

#Marche blanche pour Ginger et Seydou

Maltraitance : les 10 livres qui ont aidé Plume, ancienne enfant victime

10 livres qui ont aidé Plume, ancienne enfant victime de maltraitance

« La maltraitance subie dans l’enfance laisse des traces durables et à l’âge adulte, ce passé impacte notre vie d’une façon ou d’une autre.

Nous projeter en relation avec des enfants voire en tant que parents peut soulever de multiples questionnements. Est-ce que je vais savoir faire ? Est-ce que je ne risque pas de transmettre de mauvaises choses ? La société fait peser tellement d’injonctions sur les adultes, dont les (futurs) parents que cela peut générer en nous angoisses et conflits.

En tant qu’ancienne victime de maltraitance, portant un regard critique sur les violences que j’ai subies, rien n’est plus important pour moi que de protéger les autres et parmi eux, les plus vulnérables, les enfants. Les adultes conscients des violences, les connaissant de l’intérieur et qui ne sont pas aveuglés par le déni, sont une mine de richesses. Leur connaissance leur permet de les dévoiler et les faire entendre pour qu’elles ne passent plus inaperçu. Ils doivent devenir des adultes protecteurs et lutter contre l’impunité.

Grâce à de nombreux ouvrages et à un travail thérapeutique en profondeur sur mon histoire, j’ai trouvé des ressources pour accompagner mes enfants avec bientraitance et les protéger des violences sous toutes leurs formes.

C’est un travail de tous les jours, surtout sur soi-même. Souhaitant partager mon expérience, je vous propose une liste d’ouvrages qui m’ont aidée tant dans ma parentalité que dans mon évolution personnelle, ainsi qu’un lien vers mon autobiographie. Je vous souhaite de pouvoir trouver des outils qui pourront vous aider au mieux, pour vous et votre entourage. »

Plume


ALVAREZ Céline « Les lois naturelles de l’enfant » Collection Proche, Paris, 2022

ANCELIN SCHÜTZENBERGER Anne « Aïe, mes aïeux ! » Éditions Desclée de Brouwer, 16è édition, 2015

FAVRE Daniel « Cessons de démotiver les élèves » Éditions Dunod, 3è édition, 2020

GUEGUEN Catherine « Pour une enfance heureuse » Éditions Robert Laffont, édition 2015

LAPORTE-DAUBE Sarah« Après la maltraitance, se libérer des blessures de l’enfance » Les Éditions de l’Homme, 2019

MILLER Alice « C’est pour ton bien, racines de la violence dans l’éducation de l’enfant » Éditions Flammarion, Collectoin Champs, édition 2015

MOLINIER Pascale « L’énigme de la femme active, Égoïsme, sexe et compassion » Éditions Petite Bibliothèque Payot, 2006

ROSENBERG Marshall B. « Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) » Éditions La Découverte, édition 2016

SALMONA Muriel « Le livre noir des violences sexuelles » Éditions Dunod, 3è édition, 2022

TISSERON Serge « Vérités et mensonges de nos émotions » Éditions Albin Michel, 2005


Et le livre autobiographique de Plume, ancienne enfant victime de maltraitance

« Loin devant »

https://www.librinova.com/librairie/plume-1/loin-devant


Vous pouvez consulter toutes les ressources du site ici, notamment concernant les violences sexuelles « 9 livres sur les violences sexuelles expliquées aux enfants » ou encore, concernant la maltraitance, « 9 livres pour mieux comprendre les mécanismes des violences intra-familiales« .