Les Centres Médiatisés, également désignés comme « Espaces neutres », sont des structures où parents et enfants peuvent se rencontrer, sous le contrôle de médiateurs, qui sont là pour garantir l’application des décisions de justice mais également veiller à la sécurité de tous.
Les personnes accueillies sont principalement des familles dans des situations de conflits conjugaux. Alors le temps que les choses évoluent en mieux, c’est dans ces espaces que les membres de ces familles se croisent et se parlent.
Ces familles y sont dirigées souvent par un Juge aux affaires familiales et leur accueil ne dépasse pas 6 mois, renouvelable une fois. Il s’agit donc d’une médiation temporaire. Nous ne remettons pas en question cet aspect des centres médiatisés, dans ce cadre précis.
En revanche, cet accueil qui est vertueux pour une famille dont les parents sont dans une situation de conflit post séparation ne l’est PAS DU TOUT dans le cadre où il existe de la violence intra-familiale.
Les centres médiatisés apportent de la violence supplémentaire
En effet, quand le juge suspecte un danger potentiel au cours de son enquête, confronter un enfant, même une heure, au parent qu’il accuse de comportements malfaisants est très dommageable psychologiquement et également dangereux, même pour l’autre parent. Or c’est une réalité bien trop courante. Les enfants qui dénoncent un parent violent se voient contraints de revoir ce dernier dans les centres médiatisés. La situation n’est pas réglée, leur peur est toujours très présente… Pourtant on les oblige à recroiser la personne qui les a maltraités.
Jamais on obligerait une victime d’agression ou de viol à aller rencontrer son agresseur toutes les semaines. L’intérêt DE l’enfant doit primer sur le droit A l’enfant !
On le sait, un adulte violent ne peut pas être un bon parent. On aimerait bien que ce soit le cas, mais l’histoire de la violence intra-familiales prouve l’inverse. Et aucune rencontre parent/enfant en centre médiatisé ne changera cela, par magie. Seul un travail psychanalytique long et profond peut briser le cycle de la violence. Les visites imposées par la Justice ne font qu’apporter d’autres traumatismes et rajoutent à la violence déjà subie.
Les enfants ont déjà payé. Continuer de leur demander l’obéissance et le respect envers leur parent toxique, c’est de la maltraitance psychologique, juridique, de l’âgisme, de la discrimination et un manque cruel d’humanité. C’est nourrir un dogme éculé sur le besoin de maintenir un lien parent enfant à n’importe quel prix. Non. Le droit à la parentalité ne peut être supérieur à ses devoirs. Le parent violent “mériterait “ ces visites dont on ne peut pas le priver!!! Ses droits sont inaliénables, inscrits dans le marbre tandis que ses enfants n’ont pas d’échappatoire. Ils doivent subir, subir et re-subir.
Même dans les cas de violence avérée, où la justice a tranché et a mis l’autre parent sous protection, les enfants doivent encore rencontrer le parent violent. Si on protège l’autre parent, alors les enfants doivent également être protégés. Pourquoi on interdirait un parent d’approcher l’autre parent mais on l’autoriserait à voir ses enfants et maintenir son emprise ?
Neutres, vraiment ?
De plus, les centres médiatisés ne sont pas des lieux neutres. Bien au contraire, ils ont du pouvoir car ils font partie des rouages de la justice. Ils peuvent émettre un rapport destiné au Juge aux Affaires Familiales. Dans celui-ci, les médiateurs rédigeront un compte rendu détaillé du déroulement des visites, des éventuels dysfonctionnements, des améliorations constatées… Et c’est à partir de ce rapport que le juge, souvent débordé, rendra son jugement et prendra des décisions cruciales. Ils sont l’oeil du Juge et leurs propos ont un grand pouvoir d’aide à la décision.
Or les médiateurs ne sont pas assez bien formés. Ils manquent d’expertise sur les mécanismes d’emprise, de manipulation ou sur les mécanismes de contrôle coercitif. Pas de chance, c’est justement le point fort des parents violents ou incesteurs.
Nous ne comptons plus les rapports des médiateurs expliquant au juge que le parent toxique semble très gentil, très aimant alors qu’ils dénoncent le parent protecteur comme… surprotecteur. Ce dernier finit par devoir prouver son innocence, gérer ses enfants paniqués qui ne veulent pas venir, éviter de croiser l’autre parent qui les effraie tous, faire comprendre qu’il est le parent qui protège… Mission presque impossible, surtout quand on est déjà bien fragilisé, qu’on a perdu ses repères et sa confiance en soi. Et quand en face, on a des gens manipulés car pas du tout formés à l’emprise.
La France est en retard sur les bonnes pratiques pour protéger l’enfant et le parent victimes notamment dans le cadre de l’appréhension de la violence intra-familiale. Plusieurs pays européens ont ratifié la Convention d’Istanbul depuis des années. Celle-ci exige des juges de prendre en considération tout incident connu de violence domestique lors de la décision des droits de garde ou de visite ET de donner la priorité à la sécurité des victimes de violence. En Espagne, la loi de juin 2021 interdit tout droit de visite à un parent condamné pour violence. Suivons son exemple !
Nous demandons la fin des espaces neutres pour les familles au cœur de violences intrafamiliales, car en matière de protection de l’enfance, la neutralité pénalise toujours les victimes.
Il faut prendre parti et se placer du côté des victimes. Les centres médiatisés doivent devenir des espaces protecteurs, qui prennent en compte la dangerosité physique et psychologique du parent toxique. Les professionnels formés à l’emprise et au contrôle coercitif pourront annuler les visites en cas de souffrance ou d’instrumentalisation de l’enfant.
Protégeons les victimes !
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